Iggui Lbod
 
 

 
 
 
 

 
Iggui Lbod (au-dessus du robinet en tachelhit) était la place des Fontaines qui se trouvait trois marches au-dessus des fontaines. Iggui Lbod donnait d'un côté sur le petit pont piétonnier qui conduisait à Tassouqt et de l'autre côté donnait sur la route de Tildi. C'était l'endroit le plus fréquenté d'Ihchach.
En 1935-36, le Service d'Hydraulique d'Agadir décida d'alimenter Ihchach en eau par canalisation. Les travaux d'aménagement de la place des Fontaines furent confiés à M. Afouiz en 1936. Toute la surface de la place fut recouverte de pierres plates de couleurs jaunes et rouges. Le terrain fut légèrement incliné vers l'oued Tildi pour faciliter l'écoulement des eaux perdues. On planta des eucalyptus et des faux-poivriers qui y sont encore aujourd'hui, pour ombrager la place. Une ceinture en pierres et cinq larges escaliers protégeaient les fontaines.


Un petit pont piétonnier, soigneusement maçonné, en partie couvert de mosaïques, reliait les fontaines à Tassouqt ; les enfants d'Ihchach venaient s'amuser tous les jours sur ce pont. Le jeu consistait à glisser sur les supports du tablier qui servaient de toboggans (deux de chaque côté). Ensuite, il fallait remonter en courant la pente mais la mosaïque qui recouvrait ces toboggans était tellement lisse qu'il était quasiment impossible d'y parvenir ; néanmoins les paris allaient bon train en dattes, maïs et orge grillée.

Les fontaines furent refaites à l'européenne : on passait par une barricade pour arriver à hauteur d'un bel abri maçonné avec des petites briques rouges où on payait le ticket pour accéder à la fontaine en cuivre verdâtre : 1/10 de francs pour une gargoulette (qamqom).
Pour la première génération de pompes, on levait un levier et l'eau tombait en vrac dans le récipient.
Pour la seconde génération, on faisait tourner un plateau en cuivre au-dessus de la pompe et l'eau jaillissait de plus en plus fort selon la vitesse à laquelle on faisait tourner le plateau.

Les plus aisés des habitants avaient recours aux porteuses ou porteurs d'eau qui transportaient l'eau avec des ânes ou sur leurs épaules ou sur leur dos jusqu'au domicile de leurs clients.
Les gens payaient avec ce qu'on appelait le "fitch", espèce de pièce métallique poinçonnée et marquée SM (Services municipaux) ; ensuite on passa au papier cartonné de 3 cm2 plus difficile à falsifier.
Dans les années 50, le prix de l'eau pour un qamqom était de 5 à 7 frs selon le trajet de livraison et de 10 à 15 frs pour un qamqom d'eau provenant de l'aîn (la source).
À partie de 1951, l'eau devint gratuite à Iggui Lbod. Seul coûtait le port de l'eau.

En 1950-51, le Service des Travaux Publics d'Agadir envoya M."Lupidef" (M. Lebedeff ?) topographe d'origine russe et Hassan Anway (porte-mire marocain) habitant Ihchach, faire le relevé précis de toutes les rues, ruelles et impasses. Avec l'objectif, semble-t-il, de faire démarrer le chantier sanitaire relatif à la collecte des eaux usées et à l'adduction en eau potable pour toutes les maisons d'Ihchach.

En 1952, pour parachever le dossier, le Service des TP envoya un avion réaliser des vues aériennes du village.

Mais en 1960, il n'y avait pas d'adduction d'eau potable, à l'exception des rues 1, 2 et 6 et encore dans les tous premiers mètres, ni de réseau de tout à l'égout.
Les gens d'Ihchach préféraient aller chercher l'eau qui était gratuite aux fontaines plutôt que de payer l'eau courante à domicile.
Les marchands d'eau qui portaient l'eau à domicile accomplissaient en même temps d'autres petites livraisons comme apporter la menthe, le pain au four, la farine depuis le moulin, etc.
On entendait de loin leurs appels :
"Ha lma hlou (arabe) : Voici l'eau douce"
"Ha ya ougdour waman (tachelhit) : Voici un qamqom d'eau" …

Parmi les vendeuses d'eau, il y avait : 

 

  • Taômarte (Lalla Ta Ômarte) ;
  • Talôroussite ;
  • Fadna El Hssane ;
  • Fadna Îzzi (à différencier de Fadna Azni,
    femme de salle à l'hôpital) ;
  • Âouicha Tabâmrate.

 

 

Parmi les vendeurs d'eau utilisant des ânes qui portaient 4 qamqoms à la fois :

  • Mohamed Achehboune (actuellement en vie, travaillant dans les jardins de particuliers).
    Il avait un âne blanc ;
  • Ahmad Boukhenfer ;
  • Mohamed Boukaiti.

 

Parmi les vendeurs d'eau qui portaient les charges d'eau à
l'épaule :

 

La place résista au séisme du 29 février 1960 mais pas à la main de l'homme qui décida de la supprimer.