En 1765, le sultan Sidi Mohamed Ben Abdallah
décida de créer le port et la ville de Souira
en un lieu autrefois occupé par les Portugais pour en
faire une base pour la course, une plaque tournante pour les
ports européens et un poste de surveillance de la contrebande
du Sud.
Il souhaitait mettre un terme à l'insoumission
des tribus du Souss en fermant le port d'Agadir où se
faisait un trafic maritime qui échappait à son
contrôle et à l'imposition.
La création du port d'Es Saouira (1765) fut suivie
de la destruction du port de Massa, de la fermeture de celui
d'Agadir en 1765 et de son interdiction aux navires en
1776.
En 1773, Agadir où séjournaient encore des
marchands chrétiens et juifs, aurait été
attaquée par une harka qui aurait démoli ses fortifications
(Louis Chénier, consul de France, Recherches sur les
Maures et l'histoire de l'Empire du Maroc, III, p. 27, 1787).
Dans son journal (1787), Louis Chénier, consul de France
et chargé d'affaires au Maroc, donnait la description
suivante d'Agadir :
"En suivant la côte dans la partie Sud, on trouve
à environ 35 lieues de Mogador dans la province de Sus,
la ville de Sainte-Croix que les Arabes appellent Aguadir
ou Cap d'Aguer. L'immense baie de cette place et les environs
sont très poissonneux. (
) Cette place a été
pendant longtemps le centre d'un grand commerce ; et jusqu'en
1773, les nations de l'Europe y ont eu plusieurs établissements
que l'Empereur fit passer à Mogador après avoir
fait démolir les fortifications de Sainte-Croix".
(
)
Il ajoutait :
"Le port de Sainte-Croix est une vaste et grande baie très
sûre, qui peut contenir un grand nombre de navires et qui
est à l'abri de tous les vents. La communication de cette
place avec le Sud lui donnait plus de facilités pour le
commerce que l'on en a sur le reste de la côte" (Louis
de Chénier, TIII, p. 42, 1787).
En 1787, les
Hollandais conférèrent avec le Maroc au sujet de
l'établissement de maisons de commerce à Agadir
mais ils essuyèrent un refus et furent dirigés
vers Souira dont le développement était très
cher au sultan Mohamed (Høst, p. 141).
En octobre 1789,
le chirurgien anglais William Lemprière, appelé
à Taroudant pour soigner le prince Moulay Abdeslam, fils
du sultan Sidi Mohamed, témoigna de la ruine d'Agadir
malgré sa situation exceptionnelle :
"Agadir, dit-il,
a appartenu aux Portugais ; elle fut toujours l'entrepôt
le plus considérable des Européens jusqu'au règne
de Sidi Mahomet. C'est maintenant une place déserte ;
il n'y a plus qu'un petit nombre de maisons qui tombent en ruines.
Le port m'a paru plus sur que celui d'Essaouira, et comme il
est à portée des provinces méridionales
de l'Empire, je suis étonné qu'on n'ait pas continué
de lui donner la préférence pour toutes les spéculations
de commerce" (W. Lemprière, 1791, Voyage dans
l'Empire du Maroc et le Royaume de Fez fait pendant les années
1790 et 1791).
Le Souss, privé de son débouché
maritime, s'appauvrit et cessa d'être un centre de rébellion.
Agadir devint, selon différents témoignages concordants,
une misérable bourgade, un pauvre village de pêcheurs.