En novembre 1910,
alors qu'il commandait la Division navale au Maroc et le croiseur
"Du Chayla", le commandant français Victor
Baptistin Sénès en repérage le long
des côtes marocaines, fit escale à Agadir. Il fut
très bien reçu à la Kasbah par le khalifa
qui fut reçut à son tour à bord du "Du
Chayla".
Cette visite ne passa pas inaperçue aux yeux des Allemands
qui y virent la main mise de la France sur le Maroc.
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L'ambassadeur d'Allemagne à Paris
fit connaître au gouvernement français le mécontentement
de l'Allemagne qui envoya le 1er Juillet 1911, un navire
de guerre l'aviso "Panther" mouiller en rade
d'Agadir pour "prêter en cas de besoin, aide et
secours à ses sujets et protégés, ainsi
qu'aux intérêts allemands qui sont nombreux dans
le Souss".
Il fut bientôt remplacé par le
croiseur "Berlin" auquel se joignit l'"Eber"
dans un mouvement tournant durant cinq mois jusqu'au 28 novembre
1911.
Le petit croiseur "Eber"
assurait le ravitaillement des Allemands et le courrier à
partir des Iles Canaries.
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À la demande de la Légation
de France à Tanger, "l'Union des Mines Marocaines"
(groupement international qui comprenait de grandes firmes
de la métallurgie de France, d'Angleterre, d'Allemagne
et de Belgique créé pour faire contrepoids aux
ambitions allemandes) envoya précipitamment à Agadir
l'ingénieur français Gustave Evesque qui
se trouvait à Mogador ainsi que son collègue Antoine
Fleury. Ils s'installèrent dans la Kasbah d'Agadir.
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De nombreux Allemands (en particulier les
frères Mannesmann) avaient déjà acheté
ou tentaient d'acheter des parcelles de terrains à Agadir
(P. Zeys, p. 173). Les Français quant à eux espéraient
faire ouvrir le port d'Agadir et lutter contre les positions
allemandes en confiant à leurs ressortissants le soin
d'acheter rapidement des terrains, d'opposer leurs intérêts
aux "prétentions" allemandes.
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Les ingénieurs français
Evesque et Fleury furent missionnés à Agadir
à cet effet, chargés de créer des intérêts
français, miniers et immobiliers dans le Souss et renseigner
le Consulat français de Mogador sur les agissements des
Allemands.
La légation de France à Tanger envoya le couple
Leroux pour les seconder dans cette mission.
Léon Corcos,
correspondant de la "Vigie marocaine", membre
d'une famille importante de commerçants juifs de Mogador
et de Marrakech ayant des intérêts importants dans
le Souss et la région saharienne, les rejoignit.
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Des entreprises commerciales françaises telle la SEC de
Marseille essayèrent d'implanter des comptoirs à
Agadir et dans le Souss. Peu d'étrangers européens
circulaient à l'intérieur des terres, ils ne le
faisaient qu'accompagnés, introduits par un laisser-passer
et vêtus à la marocaine. Un certain Dorée,
vêtu d'une djellaba, écumait les souks pour le compte
des Français.
Tout ce petit monde s'installa dans la Kasbah,
hébergé par le Khalifa.
Tous les jours, nous dit Evesque, de longs palabres s'établissaient
auprès des populations tant au sujet d'acquisitions immobilières
à effectuer, que pour obtenir des renseignements sur les
activités des Allemands et préparer les missions
minières françaises dans l'Atlas et Anti-Atlas.
À la fin du mois d'août 1911, le journaliste Hubert Jacques, correspondant du
journal le "Matin" et Georges Mercier,
fondateur de la "Vigie Marocaine", rejoignirent
le groupe. Ensuite, ce fut le couple Morizet (sénateur
communiste de la Seine et rédacteur à l'"Humanité")
alors en voyage de noces, qui fit une courte visite à
Agadir (Illustration).
Les jours s'écoulaient entre les Allemands
sur leur bateau et le groupe de Français dans "le
coin français"de la Kasbah.
Les Allemands descendaient à terre
sans armes pour acheter des ufs et des légumes auprès
des habitants. Parfois, leurs officiers rendaient visite au Pacha
d'Agadir ou à son Khalifa rejoignant certains de leurs
nationaux venus de Mogador ou de Taroudant. (Illustration N°
3677, 16 septembre 1911, Villégiature à Agadir,
pp. 191-197, André Morizet)
Peu après le départ du couple
Morizet, se produisit l'incident du drapeau.
Le journal "Le Matin" avait fait savoir à
son correspondant Hubert Jacques qu'un accord avait été
conclu "donnant le Souss et Agadir à la France"
alors qu'il ne l'était pas. La petite colonie confectionna
un drapeau français qui fut hissé par Mme Leroux
avec forces cris de joie et coups de fusils. Dès que les
croiseurs allemands hissaient les couleurs, les Français
en faisaient autant au-dessus de la Kasbah et le soir, ne les
rentraient qu'après celles des Allemands.
Le Pacha d'Agadir émit une protestation qui resta sans
effet. Les Allemands, furieux, avertirent leur consulat et leur
gouvernement.
Les journaux accréditèrent ensuite
la rumeur que des troupes françaises avaient débarqué
à Agadir et occupaient la Kasbah. Les choses se gâtèrent
pour le petit groupe qui apprit par son consulat que le projet
d'accord franco-allemand était resté sans suite
et qu'il fallait cesser immédiatement ces manifestations.
Un bateau de la Cie Paquet fut envoyé depuis Mogador pour
arrêter les manifestants.
Georges Mercier de la "Vigie Marocaine"
fut chargé avec Hubert Jacques d'apporter le drapeau
à Mogador. Léon Corcos rejoignit Mogador
peu après. Le couple Leroux et Antoine Fleury
partirent ensuite.
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À Agadir, ne restaient que
Gustave Evesque et le commerçant Fernand Honnorat.
Ce dernier était arrivé à Agadir comme agent
commercial de l'entreprise marseillaise La "SEC"
(Société d'Études et de Commerce) dont le
siège social se trouvait à Marseille qui était
une société d'import-export de type colonial et
de représentation de sociétés commerciales,
financières et maritimes au Maroc.
La SEC comptait ouvrir un comptoir à Agadir avec le projet
d'étendre ses activités en direction de Taroudant
et de Tiznit. Elle effectuait pour son compte et d'autres sociétés,
l'achat de terrains en prévision de l'extension des activités
économiques et du développement des centres principaux
de la côte.
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Fernand Honnorat
s'était installé à Founti où il fut
rejoint par l'ingénieur Evesque, tous les deux
étroitement surveillés par les Allemands qui le
soir venu n'hésitaient pas à braquer sur eux leur
projecteur ce qui permettait aux deux compères de faire
d'interminables parties de cartes.
Leurs relations avec le pacha d'Agadir, favorable selon eux aux
Allemands, se détérioraient progressivement.
La "Vigie Marocaine" envoya alors son collaborateur
Georges Louis en repérage.
Les Allemands finirent par s'en aller le 28 novembre au matin
pour ne plus revenir car les négociations diplomatiques
avaient finalement abouti à l'accord franco-allemand
du 4 novembre 1911 qui laissait aux Français les mains
libres au Maroc.
(Le Souss de 1909 à 1939, G. Evesque,
Le Maroc du Nord au Sud, juilllet 1939)
(Dans le Sud du Maroc, Agadir 1911-1913, Fernand Honnorat)
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