1511
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C'était l'époque troublée
où la dynastie wattasside s'éteignait et où
émergeait dans le Souss, la dynastie saadienne qui allait
la remplacer.
À l'origine de la dynastie,
- Mohamed El Qaïm
qui lutta le premier contre les Portugais de Santa-Cruz jusqu'à
sa mort en 1517-8,
- ensuite son fils Moulay El Arej devint
Chérif du Souss en 1510 puis roi de Marrakech en 1524
;
- à partir de cette date, Mohamed
ech-Cheikh son fils cadet sera le Chérif du Souss
et c'est lui qui deviendra le premier sultan saadien du Maroc.
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1513
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En janvier 1513, le roi du Portugal Manuel
I acheta le château qu'il fit agrandir et fortifier et
y plaça un gouverneur, Dom Francisco de Castro, avec une
garnison de 700 hommes et près de 1000 alliés autochtones
et beaucoup d'artilleries lourdes de toutes sortes.
Le fortin primitif devint la citadelle de la ville avec un donjon
juste contre la mer ; de la citadelle se détachait la
muraille qui formait l'enceinte de la place ; elle comptait 7
bastions (bastion de Tamraght proche du château, bastion
du Facho, bastion situé en-dessous des fours à
chaux, donjon du château, tour de la cloche) ; elle était
percée de 2 portes (porte de la Trahison, porte du Fossé),
une escarpe du côté de la mer et une ville nouvelle.
La citadelle était entourée d'un fossé sans
eau et communiquait avec la mer par une poterne dite Porte de
la Trahison percée dans le donjon qui surplombait la mer.
Par une autre porte, la citadelle communiquait avec la ville
à laquelle elle était reliée par un pont
qui enjambait le fossé (R. Ricard, L'occupation portugaise
d'Agadir, p. 96).
Il y avait dans l'enceinte une église paroissiale (Le
Salvador), un couvent de Franciscains (Saint Sébastien)
une factorerie et un facteur (feitor) qui donnèrent une
grande impulsion commerciale à la place portugaise. Les
Ksima s'allièrent aux Portugais et vinrent s'installer
sous les murs du bourg pour renforcer la sécurité
de la place.
Aux environs de 1530, la place comptait environ 300 personnes
en incluant les fonctionnaires, les commerçants, les familles
et les esclaves. En mars 1541, elle comptera 1 600 habitants.
Elle subira plusieurs attaques des Saadiens et de leurs alliés
les Maures de guerre. |

1525
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En 1525, le Cherif du Souss Mohamed Ech
Cheikh es Saadi (1491- 1557) installé à Taroudant,
organisa une base militaire à Tamraght et ordonna une
expédition de 400 lances contre les Portugais de Santa-Cruz
qui se termina par un désastre pour ses troupes que les
Portugais repoussèrent jusqu'à Tildi. Les Saadiens
manquaient d'armes et Agadir était le port dont ils avaient
besoin pour en obtenir. |

1532
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Vers 1532-3, le Cherif fit construire
une forteresse ou un fortin à Tildi. |

1533
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En 1533, il commença à
faire installer sur le pico (haut de la montagne qui domine Santa-Cruz)
des bastions de pierres sèches, de l'artillerie et des
arquebuses qui causèrent de grands dommages aux gens de
Santa-Cruz et organisa le blocus de la place. |

1536
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En 1536, il renouvela l'assaut
avec une armée de 50 000 hommes, encercla la place forte
mais ne réussit pas à s'en emparer. Les trêves
se succédèrent réclamées par les
Portugais ou les Saadiens |
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Kasbah primitive saadienne
en 1540 |

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Avant l'expiration de la trêve
de septembre 1540, Mohamed ech Cheikh es Saadi rassembla
une puissante armée avec beaucoup d'artillerie de tous
calibres qu'il avait prise au roi de Fès et qu'un renégat
français avait fondu, en vue d'une attaque décisive
de Santa-Cruz (Marmol, I, 452) (D. Jacques-Meunié, I,
451).
Il confia en septembre à son fils Moulay Mohamed el Harrane
la charge de faire construire en moins de deux mois un bourg
fortifié avec une tour importante sur le pico (Cenival,
nbp 1, p. 88).
Il fit fondre une pièce de canon et mit sur la place quarante
ou cinquante pièces d'artillerie (D. J-M, II, p. 824)
renforcées par 5 grosses bombardes qui tireront sans arrêt
pendant vingt-deux jours (Cenival, p. 88). Une autre partie de
l'artillerie fut placée non loin des murailles de Santa-Cruz.
Telle fut la première forteresse saadienne située
sur le sommet de la colline.
Plusieurs assauts furent donnés par jour (Marmol, II,
37) de sorte que les Portugais ne pouvaient plus sortir de la
place.
Les Saadiens disposaient de trois bastions pleins d'artillerie,
beaucoup de grosses bombardes dont les six "Maymones"
qui tiraient de très gros boulets de pierre. Ces pièces
étaient lourdement traînées sur leurs affûts
par des chameaux.
Par ailleurs, les Saadiens établirent leur camp militaire
du côté de la pointe d'Anza, là où
les Portugais ne pouvaient leur faire aucun mal.
Le siège de Santa-Cruz commença vers le 16 février.
Le caïd Moumen ben Yahya ben el-Ilj, fils d'un célèbre
renégat, caïd de Tiout, fut le général
commandant le siège comme représentant du Chérif
(Cenival, pp. 90-1).
L'attaque fut menée par Moulay Abdelkader.
Toutes les pièces portugaises furent neutralisées
à l'exception de celles du bastion de Tamraght et de la
tour de la Vigie qui furent maintenus à grande peine par
les Portugais.
Après un long siège, et un assaut dont l'issue
resta longtemps incertaine, la place fut emportée par
les Saadiens le 12 mars 1541 (Cenival, p. 101) (D. Jacques-Meunié,
I, p. 451).
Santa-Cruz fut anéantie ; "le bourg fut brûlé
et détruit à raz de terre" (Cenival, p.
101) et de nombreux Portugais périrent ou furent emmenés
en captivité à Taroudant, avec armes et artillerie.
Mohamed Ech Cheikh laissera à Agadir un gouverneur et
une bonne garnison dans la place avant de se rendre à
Taroudant, sa capitale.
La prise de Santa-Cruz en 1541 accrut le prestige
de Mohamed Ech Cheikh es Saadi, conforta sa position dans le
Sud marocain et lui permit de d'accéder au pouvoir.
Il disposait du port dont il avait besoin pour acquérir
des armes et écouler la grande richesse du Souss : le
sucre qui s'y trouvait en quantité, et d'autres produits
locaux comme les cuirs et peaux, le miel et des produits très
recherchés comme l'or venant du Soudan.
En 1550, deux
factoreries se trouvaient à Agadir en dehors du bourg
: l'une appartenait à des Français, l'autre à
des Castillans (D. Jacques-Meunié, II, p. 755).
Agadir sera le port des Saadiens de 1541 à 1637 pendant
presque 100 ans.
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Une gravure datant de 1547, montre d'une
part Santa-Cruz au pied du pico avec des tours et des bastions
circulaires coiffés de toits pointus et à l'intérieur
de l'enceinte, des maisons aux toits à deux pans ; et
d'autre part sur le pico qui domine Santa-Cruz, un château
fort avec une tour que le Cherif fit édifier en 1540 (D.
Jacques-Meunié, II, p.755). Il s'agit probablement de
la gravure intitulée Shiriffi in Barbaria de l'aventurier
allemand Hans Staden qui séjourna à Agadir en 1547
avant son voyage au Brésil. Cette gravure qui figure dans
son livre est curieusement inversée comme certains documents
à cette époque. |
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Kasbah définitive saadienne
en 1572 |



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À la mort de Mohamed Ech Cheikh
Es Saadi, assassiné en 1557, son fils et successeur Moulay
Abdallah El Ghalib Billah (1557-1574) entretiendra une garnison
à Agadir.
Le port était actif, mais les Portugais qui allaient en
Guinée ou aux Indes, se plaignaient d'être attaqués
par des vaisseaux français ou anglais qui s'y cachaient
pour les piller.
En 1572, apprenant que le roi du Portugal armait une flotte à
Lisbonne et craignant le retour des Portugais à Agadir,
le sultan Moulay Abdallah fit bâtir une importante kasbah
sur la colline (pico) qui domine la baie (Cenival, p. 88 nbp1
et Torres, p. 424).
Pendant que les ouvriers travaillaient à la construction
de la forteresse, le sultan envoya 2000 renégats et 4
000 cavaliers turcs pour assurer la protection des ouvriers.
Il y employa tant de gens que le travail fut achevé en
7 mois.
Il mit ensuite dans cette place 100 hommes en garnison et la
munit de tout ce qui était nécessaire (Torrès
in Marmol, 225-226) (D. Jacques-Meunié, II, 554-555).
La Kasbah disposait d'un magasin, d'une mosquée et d'une
enceinte qui enfermait tous les bâtiments.
C'est cette kasbah saadienne qui traversera plus de 4 siècles
avant d'être anéantie par le séisme du 29
février 1960.
Le commerce maritime fut florissant à
Agadir sous les Saadiens jusqu'à la grande peste de 1596-1608.
Ensuite, pendant 12 ans les bateaux européens n'accostèrent
plus. Ce fut la fin de la culture de la canne à sucre
dans le Souss. Après 1631, l'exportation du sucre ne sera
plus mentionnée dans les textes.
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1630

1670 |
En 1630, la Kasbah d'Agadir
appartenait encore au sultan saadien Abd el Malek (1627-1631).
Il s'y trouvait un lieutenant et environ 300 hommes.
En 1636, Sidi Ali, prince du Tazeroualt qui tenait le Souss contre
le sultan saadien, établit le blocus d'Agadir obligeant
le sultan à ravitailler la forteresse par la mer grâce
aux vaisseaux hollandais (D. Jacques-Meunié, II, p. 654).
Les Juifs tenaient une part du trafic commercial qui se faisait
à Agadir avec les marchands chrétiens.
Il existait deux places commerciales : la Kasbah du haut (Kasbah
Ighir- Kasbah Oufella) et la Kasbah de la mer (Founti à
l'emplacement de Santa-Cruz).
En août 1637, Sidi Ali s'empara de la Kasbah Oufella, y
plaça un caïd dévoué à sa cause,
et le commerce, paralysé par la grande peste, put reprendre.
Le port était fréquenté par des Anglais
et par des Hollandais qui dérogeaient à l'interdiction
de vendre des armes à Sidi Ali et qui disposaient ainsi
d'une monnaie d'échange pour racheter leurs captifs quand
les navires s'échouaient ou étaient attaqués
par les corsaires (1641 à 1646).
Jusqu'en 1651, les Hollandais furent quasiment les seuls fournisseurs
de Sidi Ali. Les esclaves hollandais étaient nombreux
à Illigh, capitale du Tazeroualt et le hollandais M. de
Ruyter essaiera d'en racheter le plus possible à l'occasion
de ses voyages à bord de la "Salamandre".
Les successeurs de Sidi Ali tinrent le port et la place forte
d'Agadir jusqu'en 1670 date à laquelle Moulay Rachid à
l'origine de la dynastie alaouite s'empara de la Kasbah d'Agadir. |
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