Kasbah d'Agadir sous la dynastie alaouite


1672

 
Agadir semble avoir connu un bon développement sous le règne du grand sultan alaouite Moulay Ismaïl (1672-1727), devenant un important centre de commerce caravanier avec le Soudan, connu sous le nom de Bab Es Soudan. Toutes les caravanes s'y rendaient (O. Lenz, I, pp. 366-7).

L'anarchie s'installa dans le Souss à la mort du sultan Moulay Ismaïl en particulier sous le sultan Moulay Abdallah (plusieurs fois proclamé et renversé) jusqu'à la nomination de son fils Sidi Mohamed comme gouverneur du Souss.
 

Séismes de 1731 et de 1755


 
Agadir aurait subi un séisme en 1731 (" Von Hoff écrit : 1731 - Ein Erdbeben verwüstet die Stadt Sainte-Croix in Marocco (d'après Verneur, Journal de Voyage, t. XV, p. 50). Le commandant Roux (1934) identifie Sainte-Croix à Santa-Cruz d'Agadir " (Cité par J.-P. Rothé, Séisme d'Agadir et séismicité du Maroc, 1962, p. 18).

Agadir aurait été restaurée ou reconstruite en 1732.

En 1755, le grand tremblement de terre qui détruisit Lisbonne aurait affecté le Maroc et Agadir (Rothé, la séismicité au Maroc, p. 20, 1962).

 

Inscription bilingue
portant la date de 1746

Une inscription bilingue en arabe et en hollandais au-dessus de la porte de la Kasbah porte la date de 1746.
Cette inscription en hollandais rappelle certes l'importance des échanges commerciaux qui s'établirent entre Agadir et les Pays-Bas, mais à cette date ce n'était plus le cas.
Peu avant, des Danois avaient tenté d'établir un comptoir à Agadir mais avaient été déboutés par le gouverneur Sidi Mohamed (G. Høst).
Les archives ne permettent pas de retrouver la création d'un comptoir hollandais à cette date.

Inscription bilingue

 

Gérance du port d'Agadir

1762
 
Les ports du Maroc étaient fréquemment mis en gérance par le sultan. En 1762, on apprend par Georg Høst qui fut vice-consul danois à Souira, que "le juif Ben Isso" avait en gérance le port d'Agadir, pour laquelle il était redevable d'une somme de 20 000 piastres. Connaissant bien ce Juif, le sultan Mohamed Ben Abdallah le fit venir devant lui et lui dit :
"Toi, le truand, tu vas recevoir la peine que tu mérites, non pas à cause de l'argent que tu me dois personnellement - tes frères (les autres Juifs) me le paieront jusqu'au dernier sou - mais pour ce que, toute ta vie durant, tu as truandé tant chez les Maures que chez les Chrétiens, et même chez les autres Juifs".
"Et il lui fit couper les deux mains" (G. Høst, p. 62).
 


Création de Mogador (Essaouira)
Déclin et fermeture d'Agadir (1765-1776)

 
En 1764-5, le sultan alaouite Sidi Mohamed ben Abdallah (1757-1790) qui fut gouverneur du Sous sous son père le sultan Moulay Abdallah, décida de créer le port d'Essaouira (Mogador) en un lieu autrefois occupé par les Portugais pour s'assurer et contrôler le monopole du commerce maritime et mettre un terme à l'insoumission des tribus du Souss qui menaçaient la sécurité de l'empire.
Le port de Massa sera détruit et celui d'Agadir fermé en 1765 et définitivement interdit aux navires étrangers en 1776.
Les habitants d'Agadir devront migrer à Essaouira où un quartier "Derb Ahl Agadir" leur sera attribué.
Des négociants juifs seront encouragés à venir s'installer à Souira, logés à l'intérieur de la Kasbah. Les familles juives commerçantes Aflalo, Pena, Guedala (familles de Tujjar Es Soltan) quitteront Agadir.
Le consul de France, Louis Chénier, confirmera que la place d'Agadir fut pendant longtemps le centre d'un grand commerce jusqu'en 1773 ; les nations de l'Europe y avaient plusieurs établissements que l'empereur fit passer à Mogador, "après avoir fait démolir les fortifications de cette ville".

 

1776



1880

 
À partir de cette date, le mouillage d'Agadir ne sera plus guère fréquenté et la ville sera quasiment ruinée (D. Jacques-Meunié, II, 555).
Les voyageurs qui traversent le Souss et passent devant Agadir, s'étonnent de cette situation ; en 1789, le chirurgien anglais William Lempriere appelé à Taroudannt pour soigner le fils du sultan Sidi Mohamed ben Abdallah, observe que la place d'Agadir est déserte. Il s'étonne qu'on n'ait pas continué à donner la préférence à cette place pour toutes les spéculations de commerce (W. Lempriere, 1791, Voyage dans l'Empire du Maroc et le Royaume de Fez fait pendant les années 1790 et 1791).

Dans la traduction française de cet ouvrage sous le titre : " Le Maroc il y a 100 ans, " figure une gravure de Peter Haas représentant la Kasbah d'Agadir Oufella et Founti (Santa-Cruz) qui se trouve dans l'ouvrage de Georg Höst, vice-consul danois à Mogador (Efterretninger om Marokos og Fes (1760-1768).

En 1880, l'explorateur Oskar Lenz qui séjourne dans le Souss, constate à son tour que le port d'Agadir est le meilleur des ports marocains ; cependant, il est vide et abandonné. La ville est en complète décadence ; elle ne compte que quelques centaines d'habitants, tous Maures, à l'exception de quelques familles juives.
Agadir située sur un rocher de plus de 200 mètres d'altitude constitue une forteresse naturelle en outre fortifiée par des murailles et des batteries. L'une de ces batteries se trouve au pied de la montagne, tout près de la mer et était destinée, à l'origine à protéger une source d'eau douce et abondante ; elle domine également l'accès de la forteresse aussi bien du Nord que du Sud, ainsi que celui de la baie (O. Lenz, I, p. 366).

 


1882



1913

 

 

 

 
En 1882, deux ans plus tard l'officier Jules Erckmann, instructeur et chef de la mission française au Maroc (1878-1883) pour le compte du sultan Hassan I (1873-1894), constate que les murs de la forteresse d'Agadir sont bien conservés mais les chemins qui y aboutissaient sont difficiles et tortueux.
Celui qui passe à l'Est longe le mur d'enceinte à un endroit où il n'y a guère que deux mètres de hauteur, ce qui permet aux voleurs de l'escalader ; du côté de la mer, on voit un misérable village de pêcheurs appelé Founti.


La place d'Agadir étant le meilleur mouillage de l'océan depuis le cap Spartel jusqu'au cap Juby, la ville aurait dû s'étendre, mais il n'en fut rien : après la fondation de Mogador (Essaouira), elle fut fermée au commerce européen et ses relations avec l'Europe cessèrent à peu près complètement (J. Erckmann, pp. 50-51). 

Il en fut ainsi d'Agadir jusqu'à l'occupation française de juin 1913 ; Agadir Ighir ou Agadir Oufella étant la Kasbah et Founti, le village en contrebas.

Occupation de la Kasbah en 1913