Les hammams d'Ihchach
 
 

 
Le village avait trois hammams pour toute sa population (environ 7000 habitants en 1960).
Celui de Mhend Abatkok (1) se trouvait dans une ruelle entre l'Oued et la route de Tildi.
Le second hammam (2) se situait rue 1, à quelques mètres de la mosquée du village. Il était géré par Mokrich Saïd Attanane.
Le 3ème hammam (3) se trouvait juste derrière cette même mosquée, enclavé dans une ruelle en S. Il appartenait à Moulay Lahcen Nsbitar, il était géré par Ali Abidar.

 

On reconnaissait les hammams aux tas de bois stockés près de la chambre de chauffe. Le vestiaire comprenait un nombre suffisant de niches où l'on rangeait les vêtements. Le caissier se tenait dans le vestiaire pour surveiller. Les enfants de moins de 6 ans accompagnés ne payaient pas.
Chaque personne avait droit à un seau en bois (aga).
On accédait depuis le vestiaire à la première chambre dite modérée puis à la seconde très chaude sans qu'il y ait de portière.
Les chambres étaient presque obscures ; un mât placé en travers permettait d'accrocher le pantalon (seroual) ou le vêtement long.
Des bacs d'eau froide et d'eau chaude se trouvaient dans la chambre modérée. Des petites toilettes avec une porte courte s'y trouvaient également.
Quand on manquait d'eau chaude ou froide, quelqu'un disait à haute voix : "Bard ou sghoun à Moulay Yacoub" (eau froide ou eau chaude, Moulay Yacoub).
Une fois le corps en sudation, on s'enduisait de savon beldi en pâte (dit savon noir) à base des cendres de coques d'amandes, réputé pour décoller facilement toutes les couches de saletés accumulées. Ensuite, on frottait son corps avec de l'alfa broyé. Pour les pieds, on utilisait des morceaux de pierre de l'oued, rugueuses ou lisses.
Dans les hammams, il y avait toujours un ou deux hommes au service des baigneurs pour les frotter, les étriller, les étirer, les masser et aider jusqu'aux ablutions finales en remplissant les seaux d'eau.

Les gestes du masseur étaient assez folkloriques, accompagnés d'un sifflement et de légères tapes qui hypnotisaient le baigneur, balloté dans tous les sens et qui disait de temps à autre :
"Que Dieu bénisse tes parents !"
Les mêmes gestes étaient effectués chez les femmes dans leur hammam.
Les hommes s'entraidaient entre eux même s'ils ne se connaissaient pas auparavant (la même chose chez les femmes).

On se rendait au hammam deux fois par mois. Les horaires étaient bien arrêtés : le jour pour les femmes, la nuit pour les hommes.
Les trois hammams avaient un accès direct à l'eau courante et déversaient leurs eaux usées directement dans l'oued Tildi.
On reconnaissait l'emplacement, aux roseaux qui y poussaient.
Tout le monde sortait du hammam bien enveloppé des pieds à la tête pour éviter le "coup de froid".

Monsieur Simon (directeur de l'école musulmane de garçons de Talborjt et de l'école primaire d'Ihchach) distribuait des bons d'accès gratuit au hammam Abatkok tous les 15 jours. Il y avait certainement une convention entre les établissements scolaires ou M. Simon et le hammam Abatkok.