Mohamed Ben Ali dit Bahioud (celui qui rêve éveillé) rêvait
d'être cinéaste, réalisateur ou producteur.
Il n'avait pas fréquenté comme les autres enfants
de son âge, l'école publique.
Il était l'unique enfant d'Ihchach
à fabriquer et à monter des accessoires de projection
de cinéma. Ces accessoires étaient une lampe à
carbure, une loupe, des petites manivelles artisanales pour dérouler
et enrouler les films projetés.
L'écran était le voile blanc de sa maman qu'il
accrochait au mur de son hall obscur.
Il partait tous les matins faire les poubelles des cinémas
d'Agadir : cinémas Marhaba, Rialto en Ville Nouvelle,
cinémas Rex et Sahara à Talborjt, pour récupérer
les coupures de film qu'il mariait ensemble.
Il était le commentateur ; il se faisait aider par un
ami pour faire avancer minutieusement les morceaux du film.
Il acheta une guitare, apprit à en
jouer pour accompagner la projection.
Les enfants d'Ihchach fréquentaient tout jeunes son cinéma
en payant l'entrée avec des toupies, des billes, des roulements,
dattes, pois chiches
Lahsen l'accompagnait lors des sorties de scouts et aimait sa
musique, ses chants berbères, ses projets et ses ambitions
Il se demande ce qu'il serait devenu aujourd'hui, s'il était
né à Hollywood.
Rescapé du séisme, on l'a perdu de vue depuis.