Avant l'occupation française, la population d'Agadir était constituée de fractions de tribus d'origines différentes.
Sur ordre du sultan Moulay Mohamed Ben Abdallah, les anciens habitants avaient été chassés de leurs terres et remplacés par des fractions de tribus berbères voisines : Ksima, Mesguina, Ida Ou Tanane et Haha Aït Tameur.

Les Ahl Agadir, originaires des Ksima, Mesguina et Ida Ou Tanane se trouvèrent ainsi mêlés à Founti.

Par contre la population de la Kasbah et des douars environnants était en majorité constituée par des Haha Aït Tameur.
Parmi ceux-ci, les Imessouane peuplèrent la Kasbah ; les Aït Khemis, Tildi (à peine 12 qanouns); Les Aït Ouferni, Taddert sur un plateau boisé (à peine 12 qanouns) ; les Aït Tameur, Tamraght (70 qanouns) ; Les douars Iguer Oufoullous, Assersif et Taqemmou qui formaient la fraction d'Aourir (160 qanouns) furent habités par les Aït Youssef.

En 1926-7, les agglomérations réunies de Founti et de la Kasbah, y compris les familles juives, comptaient à peine un millier d'habitants. Dans les douars cités ci-dessus, la population comprenait approximativement 255 qanouns.



En 1927, le pays était sous le commandement du Pacha Si Lahcen Ou Brahim Et-Tamri, ancien cadi d'Agadir et caïd des Aït Tameur qui remplaça comme pacha le caïd Ksimi destitué en 1921. Du pacha dépendaient deux cheikhs : Lahsen Amjott pour la Kasbah et Founti, et Ali Ou Bihi qui habitait Taqemmou pour le reste du territoire. Chaque douar avait un amine, chef de djemaa : Mohammed Ou Bihi Naït Mbarek à Tildi ; Abdallah Ou El Hadj à Taddert ; El Hassen ou Hammou à Tamraght ; Lahcen Ou Omar à Assersif (Boniface, 1927 Mémoire, p. 16-18)

En 1927, la population européenne d'Agadir (troupe comprise) atteignait environ 1500 habitants. Elle était composée de fonctionnaires des bureaux de Renseignement du Territoire et de l'annexe Agadir-Ville & Banlieue qui contrôlait les Ahl Agadir, des fonctionnaires des Travaux Publics, du Port, des Douanes et des Eaux et Forêts à Founti et d'un hôpital dans la Kasbah en 1927. La garnison était à l'effectif d'un bataillon.

 Annuaires téléphoniques


Agadir était doté d'une école fréquentée par une vingtaine d'enfants. La ville était reliée à Mogador par un service automobile qui assurait le transport du courrier (1927, Boniface, p. 36).

Ecoles de Founti


Quand on demandait à un autochtone de Founti où il habitait, il répondait Aït Ouguerram (ceux du marabout) ou Founti :

- Les Aït Ouguerram occupait la partie allant de Talat ou Dar Nadir aux Services municipaux (c'était le quartier du marabout Sidi Boulknadel ou partie S-E) ;

- Founti proprement dit (Douar Ibhrine) occupait la partie allant de Talat ou Dar Nadir à la Maison de France (partie N-O).

Les Aït Ouguerram disaient qu'ils étaient des Chorfa(s) descendants de Boulknadel. Ils disaient qu'ils étaient les premiers à avoir occupé ce territoire. Les autres seraient arrivés après la création de Santa-Cruz par les Portugais qui auraient appelé ce quartier Founti.
Ceci se raconte depuis des siècles et encore maintenant après la catastrophe du 29 février 1960
(Source : Lahsen Roussafi d'après les souvenirs d'anciens Gadiris).

 Habitants

L'activité des habitants de Founti, autochtones et européens, était surtout tournée vers la mer et la pêche traditionnelle et artisanale : pêcheurs, patrons pêcheurs, charpentiers marins, armateurs, conservation et séchage du poisson.


Au début des années 1900, le port (naturel) d'Agadir (Founti) qui était fermé au commerce, avait ses charpentiers qui construisaient des barcasses (abarco). L'ancien raïss du port, Lhassen Ben Ali Aboudrar, appartenait à une vieille famille de raïss. Lui et son fils le Khalifa Mohamed avaient participé à plusieurs sauvetages périlleux. Ils étaient de très bons marins ; 36 marins servaient sous leurs ordres lorsque les services de l'aconage du port l'exigeaient. En temps ordinaire, tous se livraient à la pêche. Les difficultés de construction des pirogues les amenèrent à utiliser quelques youyous et des canots achetés à des bateaux de commerce de passage (6 embarcations sur la plage de Founti) (1923 Rapport de Robert Montagne, p. 31, CADN).

Ainsi parmi les familles Aït Ouguerram et de Founti, nombreuses étaient celles qui se consacraient à la mer (signalées par une sardine bleue ) :

 Parmi les familles Aït Ouguerram (du Marabout) :
Aït Aïcha Salah
Aït Ali Ou Mahjoub (commerçants)
Aït Bakrim (pêcheurs et barques)
Aït Biga (pêcheurs et barques)
Aït Bougjja (conducteur de grue-construction du port)
Aït Bouih Lahoucine (armateur)
Aït Boumart (travaillait pour les Habous)
Aït Bouzid (pêcheurs et coarmateur avec M. Sambrana)
Aït Cherabin (armateur)
Aït Da Îssa (Mokhaznis)
- Aït El Hadj Lahoucine (vente et réparation de vélos)
Aït El Meârès (armateurs)
Aït Hadj Malek (commerçants)
Aït Hmed El Fassi (mareyeurs)
Aït Ou Boulmounada (commerçant avec M. Serpinsky à Talborjt : liqueurs et limonades)
Aït Ouâbaïd (pêcheurs et patrons de pêche)
Aït Oubayh (armateurs)
Aït Oughennaj (chef des Chaouchs, un de ses fils est devenu commandant de la Marine Royale)
Aït Oughroud (Lastras et des barques)
Aït Ouguezzar (bouchers)
Aït Ouherwach (maçons)
Aït Oulbouh (Chaouchs de TP et commerçants)
Aït Oussihel (maçons et commerçants)
Aït Sanana (pêcheurs)
Aït Sidi Lahoucine (Imam mosquée de Talborjt)
Aït Tranglo (Mokhaznis)
Aït Wakrim (pêcheurs et barques)
Aït Wakssim (Autorités)

 

(Source : Lahsen Roussafi)

 Parmi les familles de Founti (Douar Ibhrine) :
Aït Abdallah nsi Hmad (armateurs)
Aït Bahbibi (pêcheurs)
Aït Boïni (Mokhaznis)
Aït Boubker (pêcheurs)
Aït Bougjja (patrons de pêche)
Aït Chef Allal (pêcheurs et barques)
Aït El Zerg (armateurs)
Aït Elâlam (Service des Renseignements)
Aït Gouferni (patron de pêche)
Aït Iboudraren (Taghroust et mareyeurs)
Aït Îssaoui (patrons de pêcheurs - Cheikh de Founti-Kasbah)
Aït Jamaâ Ou Hmad (pêcheurs)
Aït Jamaâ Ouârab (pêcheurs)
Aït Jemoû (commerçants)
Aït Khatat (poissonniers aux marchés et souks)
Aït Kssas (pêcheurs)
Aït Largo (armateurs)
Aït Mahmoud (patrons de pêche et Raïss)
Aït Mimi (menuisiers)
Aït Mjoute (Lastras)
Aït Oûbaïd (pêcheurs et barques)
Aït Oubidar (chauffeurs et mécaniciens à la SATAS)
Aït Oubidar (menuisiers)
Aït Oufenssou (mareyeurs)
Aït Ouhjoub (plombiers)
Aït Oujaâ (Police)
Aït Oukoumi (moulin à grains)
Aït Oumjoud (commerçants et barques)
Aït Raïss Abdelmalek (Cheikh)
Aït Sidinou (fonctionnaire à la Marine Marchande)
Aït Taddart (pêcheurs)
Aït Winou (Douane)
Aït Wijjane (commerçants)
Aït Ahmed Baybay (pêcheurs et barques)
Aït Oumzil (forgerons)

Dans cette partie du village, il nous faut évoquer Hadj Largo qui vécut à Founti avant d'habiter Talborjt, Ahmed Sidinou, Amjott (Kimaoui) Saadani, Bernardo qui habitaient la même rue.

Le pacha El Hadj Lahcen Ksimi (1916-1925) habita Dar Ksimi où il avait son bureau. Le pacha par intérim Bouhmouch habita Founti à Dar Ksimi1 avant de s'installer à Talborjt.

Ahmed Sidinou

 Bernardo

 Hadj Largo

 Iovleff

Parmi les commerçants de Founti, il y avait des petits boutiquiers, peu d'Européens. Ces commerçants vendaient du sucre, du thé, des bougies, des œufs, tout ce dont on avait besoin au quotidien.

Certains exploitaient des cafés maures, gargotes et restaurants marocains.
Furent autorisés par arrêtés municipaux à exploiter un café maure à Founti :
- Moulay Ahmed Ben Allal Sbaï, le café maure n°4, puis un restaurant marocain à cet endroit ;
- Lhacen ben Brahim ben M'hand, un café maure en avril 1931 ;
- Mahmoud ben M'Bark un café maure-gargote, local n°29, rue 8, en mai 1935, mais cette autorisation sera annulée en août 1953 ;
- Mohamed bou Baghaleb, un café maure au Marabout de Sidi Boulknadel en mai 1937 ; autorisation annulée en août 1953 ;
- Ahmed ben Bihi Lahoussine (Mokhazni en retraite), un café maure en juillet 1948 ;
- Faradji ben M'Bark, un café maure en février 1950 et au Marabout de Sidi Boulknadel en mai 1953 ;
- Abdelmalek ben Ali, un café maure rue n° 6 en avril 1953 et un restaurant marocain en mai 1954 ;
- Hassan ben Saïd, un café maure rue n° 8 en septembre 1953, qu'il transformera en restaurant en octobre 1954 ;
- Fadna bent M'Bark fut autorisée à exploiter un café maure à l'entrée du port et à en confier la gérance à Mohamed ben Saïd en novembre 1953 ;
- Lahcen ben Ali ben Saïd Lahrairi, un restaurant marocain en décembre 1953 ;
- Hatim Ahmed ben Lahcen, un café maure, rue Alibert, n°4, en mai 1955 et un restaurant marocain, rue Alibert en juin 1955 ;
- Belaïd ben Raïss Lahcen ben Ali, un restaurant marocain à l'entrée du port dont la gérance sera confiée à Brahim ben Ahmed ben Mohamed en avril 1955

Il y avait quelques bouchers dont un à Dar Ksimi près de l'abreuvoir et un autre dans une baraque au petit souk. Il n'y avait pas de poissonnier à Founti. Chacun se servait au port. Comme la plupart des gens de Founti "travaillaient à la mer", le poisson ne s'achetait pas, les voisins apportaient le poisson.

Il y avait quelques cordonniers, menuisiers, un forgeron, des coiffeurs traditionnels qui étaient chargés d'effectuer les circoncisions comme le Maâlem Abdallah et Si Lamine.

Le célèbre cycliste commença son activité professionnelle à Founti en 1949 en tant que réparateur de cycles chez Lahoucine Baya, rue Alibert. Puis il créa un petit atelier de cycles à Dar Ksimi ainsi qu'une petite épicerie.

 Abdallah Rami dit Founti

Parmi les accoucheuses traditionnelles de Founti, on se souvient de Tanasserte, Yamna Takhssasite, Jedda Bihi N'Aït Oubaïd, Lalla Melâïd Iboudrarene.

Quelques Européens habitaient Founti, certains avaient une activité en lien avec la mer (conserveurs, armateurs comme M. Iovleff, transitaires comme Moryoussef) mais d'autres étaient des fonctionnaires (Services Municipaux, Secrétariat de Région, Police, Eaux-et-Forêts) qui bénéficiaient d'un logement de fonction. Une européenne (peut-être espagnole) tenait une épicerie ("Épicerie du Progrès") dans l'immeuble Ksimi1 : tél. 25-24 en 1955 ; d'autres tenaient un bar (Chouchelamane) une épicerie (Garcia, Esclapez ou Oubaha) ou un bar-buvette (Vilaplana) ou un café maure en allant vers le port. La famille Masson habitait la villa Heurtebise près de Sidi Boulknadel.

Après le déménagement des Services municipaux en Ville nouvelle, la Caisse Régionale Marocaine d'Épargne et de Crédit d'Agadir s'installa dans les anciens locaux des Services Municipaux.

Les anciens aimaient raconter : "Founti sur mer - Paradis sur terre !" Quand les gens se croisaient dans la rue au lieu de dire Salam ou Bonjour les uns disaient : "Founti sur mer" et les autres répondaient "Paradis sur terre !". Cette salutation rituelle aurait été instaurée par un certain Le Rouzic …(souvenirs recueillis par Lahsen Roussafi).