NEPTUNE

 

L'usine Neptune se trouvait au début de la rue des conserveries (rue El Mohit actuelle) à l'emplacement des ruines de RIDAGA en face des dépôts de carburants Shell.
 

 Le propriétaire de NEPTUNE à Anza était André Guelfi (né le 6 mai 1919 à Mazagan).
Il était également propriétaire d'une usine au Quartier industriel des Abattoirs.

 

André Guelfi était passionné de courses automobiles ; il en gagna certaines et le surnom dans ce milieu de "Dédé La Sardine".

 Grand-Prix-automobile d'Agadir (site de Régine Caïs-Terrier)

 

 

 
 


À Agadir, vers la fin des années 30, le jeune André Guelfi avait un oncle, Clovis Sambrana (frère de Farid Sambrana bien connu à Agadir pour sa maison d'assurances créée en 1927, agence maritime et immobilière). Clovis Sambrana "faisait" selon l'expression d'A.Guelfi, du poisson salé et fumé dans un atelier de salaison à Anza. Il cherchait des associés pour s'agrandir, se moderniser et construire une station pour sécher et fumer le poisson (A. Guelfi, L'original, p. 128 et s.).
Vers 1936, André Guelfi qui avait tout juste 18 ans et venait de trouver un emploi dans une banque à Casablanca, décida, selon son expression, de "marcher" avec son oncle "pour faire le poisson". Il se rendit dans les zones de pêche pour constater par lui-même que le poisson était en quantité et en qualité près d'Agadir mais que les méthodes de pêche pratiquées étaient "dépassées" et qu'il fallait pêcher soi même pour alimenter de façon efficace ses usines. Il enrageait de devoir "se cantonner dans le fumage de la palomette, de mettre le thon et la sardine salés en barils pour les vendre aux grossistes au lieu de maitriser toute la chaîne" de production.

Libéré des obligations militaires, après avoir servi en Indochine où il sut faire des affaires, le jeune Guelfi, rentra à Agadir et retrouva, dit-il, une usine encore plus archaïque qu'avant son départ.

Les fours étaient rudimentaires et le poisson était séché à l'extérieur.
Guelfi transforma l'usine de salaison et de fumaison en conserverie et commanda deux sardiniers pour disposer rapidement du poisson.

Il épousa en 1948, Renée Barutel, fille cadette de Fernand Barutel président de la Chambre mixte de Commerce et d'Industrie d'Agadir.

 

Une usine fut créée à Anza pour la mise en conserve des poissons sous la marque "NEPTUNE".
Dans cette nouvelle usine, André Guelfi raconte qu'il "faisait tout de A à Z". Il surveillait les pêches en qualité de patron. Quand les pêches étaient insuffisantes, il en achetait au port en tant que responsable des produits. Il était chef de fabrication à l'usine, et chef comptable dans les bureaux. Il calculait qu'il vendait 450 à 500 caisses par jour.
Selon lui, son usine de conserve produisait la meilleure qualité. Il obtint le plus gros quota à l'exportation sur le marché anglais.
Il y avait 3 modèles de boîtes de conserves : l'un avec la signature d'A.Guelfi reproduite sur le couvercle, l'autre orné de la photo d'une Gordini (en lien avec la passion de Guelfi pour les courses automobiles), sans oublier "Neptune" sur celui des débuts (ibidem, p. 196-197).

Après le départ de Clovis Sambrana pour la France, André Guelfi devint le seul patron.

Il s'associa avec un ingénieur M. Blay pour trouver le moyen de congeler la sardine pendant la période de plein rendement et pour la traiter pendant la période creuse. Il passa commande de son premier sardinier congélateur "Géo André" de 54 m de long, révolutionnaire disait-il, qui lui permettait de congeler à bord 100 tonnes de sardines vivantes par jour et de "s'emparer de 85% du marché presque d'un coup" (ibidem, p. 220).
Ce sardinier disposait d'un filet de 3 km de long et quand la boucle se refermait sur le banc de poisson, on resserrait le cercle, et du bateau, avec un filet plus petit de 300 m. environ, on rabattait les tonnes de sardines dans un grand salabre. Les sardines tombaient dans une saumure entre -35 et -38°, instantanément congelées vives. Plus légères que la saumure, les sardines remontaient à la surface, aspirées à travers des grilles pour tomber sur un tapis roulant et rentraient en caisses stockées à -40° dans la cale.
Guelfi demanda à la maison allemande Bader de mettre au point une machine à étêter les sardines.
Il aimait raconter qu'il était devenu le premier exportateur du Maroc et qu'il gagnait des sommes folles (ibidem, p. 223). Il fit construire un second sardinier-congélateur "Le Guy Boniface" en association avec Monia Ostrowsky, directeur de l'usine OMACI (ibidem, p. 274). Il disposait de frigos aux îles Canaries pour stocker la pêche quand il n'était pas possible de transférer les sardines sur les cargos frigos de la Sté COBRECAF (ibidem, p. 220-223).
Il aurait employé, dit-il, jusqu'à 3 000 ouvrières, prenant d'autres entreprises en gestion (ibidem, p. 224), exportant des millions de caisses de conserve et autant de sardines congelées entières ou étêtées. Bref, il aimait raconter qu'"il était devenu le numéro un dans le métier" (ibidem, p. 224).
Les déchets de poissons étaient traités dans une usine de farine.
Guelfi disposait avant le séisme de 1960 d'une flotille de bateaux de pêche, de deux usines de conserves, d'une usine de farine de poissons et d'un frigo (usine de congélation) ultramoderne.
Les usines de Guelfi furent endommagées par le séisme de 1960. André Guelfi se considéra comme "presque ruiné" (ibidem, p. 224), abandonna Agadir, s'installa en Mauritanie ("l'endroit le plus poissonneux du monde à l'époque" selon lui) (ibidem, p. 241).

 
 Il fit construire un bateau-usine "Le Clupea" ("la sardine") qui pouvait traiter 100 tonnes par jour de congelés prêts à la vente et 1000 tonnes par jour transformés en farine de poisson. Mais très vite le "Clupea" prit feu et coula.