Douars de tentes
 
 

 

Au début des années 50, hormis le petit douar de Sidi Hnine, il y avait à Anza un quartier industriel qui venait de surgir comprenant des ateliers de salaison et des conserveries installées en bordure de l'océan et un peu plus loin, des carrières, une usine à plâtre.

Dès 1947, il n'y avait plus assez de main-d'œuvre disponible à Agadir pour travailler dans les usines. Le général Miquel, chef de région, en accord avec le pacha d'Agadir, accepta d'envoyer des prospecteurs dans les douars pour recruter la main d'œuvre nécessaire, et faire amener chaque matin en camion des ouvrières pour les ramener le soir chez elles (source : Colonel Marcel Mathieu, Une vie exaltante, 1981).

En début d'année 1948, la crise de main-d'œuvre fut telle que certaines conserveries ne tournèrent qu'à 40% de leur capacité. Les conserveurs se plaignaient sans cesse de manquer de main-d'œuvre quand le poisson arrivait. Certains créèrent dans l'enceinte de leurs établissements (Roches-Noires, CONSAGA, et quelques autres) des petites médinas pour avoir le personnel "sous la main". Il s'agissait de pièces minuscules alignées comme les box d'une écurie d'où le nom d'"écurie" que tout le monde donnait et donne encore à ces lieux. Parfois des tentes noires pointues étaient installées dans l'enceinte de l'usine. Mais cela était insuffisant à loger toutes les ouvrières et leurs familles.

Comme le "ramassage" des ouvrières à l'extérieur d'Agadir ne suffisait plus, on fit venir des Sahraouies ainsi que des femmes des Haha. Les femmes "bleues" de Goulimine et celles des Haha arrivèrent avec leurs enfants.


Les autorités militaires espéraient l'aide des conserveurs intéressés au premier chef pour solutionner le problème du logement.
Elle ne vint pas ; le commandant Mathieu décida de faire installer des campements à Anza comme au Quartier industriel des Abattoirs avec l'appui du Dr Marianne Langlais (La "Toubiba") médecin-chef du Service régional de la Santé et de l'Hygiène publique.

Plusieurs douars de tente furent installés au milieu des euphorbes dont le Douar des gens du Sud, arrivés avec leurs troupeaux de chèvres, ânes et quelques vaches dans un espace vacant entre les carrières, au-dessus de la conserverie des Roches Noires. Il y eut d'autres douars de tentes tel celui qui occupait un grand espace au-delà de la cimenterie (avant la construction de cette dernière), le douar Hassania, ou le douar des carrières Daydé (du nom d'un des constructeurs du port d'Agadir qui exploitait ces carrières).

 

 
Après la construction de la cimenterie, un important douar de tentes fut créé, constitué de tentes noires pointues parfaitement alignées, regroupées par tribu sous l'autorité d'un cheikh, au-delà des conserveries vers CONSAGA. Un crieur, soufflant dans une corne, appelait les ouvrières lorsque le poisson arrivait.


Un camp de légionnaires installé sous des tentes près de l'usine OMACI était chargé d'assurer la sécurité des lieux (Souvenirs recueillis par Lahsen Roussafi auprès de messieurs Mustapha, Ahmed Rimulus et Hadj Lahoucine).
Les ouvrières étaient classées selon leur origine ethnique, dans un douar de 140 tentes environ, bien alignées afin de permettre une circulation facile, un rapide enlèvement des ordures ménagères, une bonne aération. Un cheikh (chef de quartier) avait été nommé pour encadrer les ouvrières.
Un service médico-social avec dispensaire doté de jeunes assistantes sociales fut mis en place en 1950 après celui de Khyam Battoir au QI du S-E (Colonel Marcel Mathieu, Une vie exaltante, 1981).

L'eau potable était amenée par camion-citerne au début. Selon le commandant Mathieu, "les ouvrières correctement payées sauvèrent en 1950 et en 1951 de nombreux foyers par l'apport d'argent régulièrement gagné dans les usines. Les employeurs furent surpris de la rapidité d'adaptation de ces jeunes femmes du bled pour lesquelles le dépaysement était total" (pp. 302-307, Colonel Marcel Mathieu, Une vie exaltante, 1981).

Vers la pointe Sahnoune, les gens du Sud purent construire par eux-mêmes des maisons "pierre-chaux" avec les moyens du bord : les maisons El Âareb : bien alignées selon un plan précis face à des boutiques et à proximité du souk du bord de mer.

 
 

 
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