Les effondrements complets
L'extrême division des débris
traduit la qualité très moyenne des constructions
ou bien que certaines privautés aient été
prises avec une ou plusieurs règles de l'art qui en
temps ordinaires seraient passées inaperçues, mais
en cas de circonstances exceptionnelles comme ici, expliquent
que la catastrophe ait été totale et de surcroit
totalement meurtrière.
1-Première conclusion à
tirer :
Il faut toujours respecter les règles
de l'art et les règles en vigueur même lorsqu'à
la suite d'un certain nombre d'expériences heureuses on
peut se sentir enclin à discuter le bien fondé
de certaines d'entre elles.
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Les effondrements partiels
Ils ont en général concerné
des constructions de conception normale bien calculées
et exécutées.
Le Bureau Securitas avait assuré à Agadir le contrôle
de 31 constructions dont le Cinéma Sahara de Talborjt,
la coupole du Bâtiment des Douanes, l'Hôtel
de Ville, l'immeuble SIBRA (8 étages).
Les 31 ouvrages ont donné lieu à 2 effondrements
partiels seulement, parfaitement explicables. Leur étude
est instructive.
Le Sud-Building
L'immeuble composé de deux corps du bâtiment en
équerre reliés par un arrondi comportant des étages
en porte-à-faux sur la rue.
Dans l'arrondi, le porte-à-faux atteignait 2,50 m. Les
accélérations verticales développées
par le séisme l'ont à la fois surchargé
et mis en résonnance. La rupture s'en est suivie avec
des conséquences pour certaines autres parties du bâtiment
mais la catastrophe aurait pu être totale.
Elle ne pouvait être évitée que par l'application
de règles spéciales propres aux régions
sujettes à séisme.
Le Marché de la Ville nouvelle
Il comportait un étage avec de grandes portées
libres (8,60 mètres) entre poteaux. Le plancher-terrasse
était d'un type lourd (protection thermique). Ce bâtiment
était correctement calculé pour les efforts du
vent. Il offrait effectivement peu de prise au vent mais par
contre les accélérations dues au séisme
ont développé en tête de chaque poteau, en
raison du caractère massif du plancher et de la grande
surface de plancher agissant sur chaque poteau, des efforts horizontaux
considérables de très loin supérieurs aux
efforts du vent.
Le 1er étage s'est couché mais le rez-de-chaussée
où les poteaux calculés pour les importantes surcharges
du 1er étage avaient reçu une inertie plus grande,
a parfaitement résisté.
Dans ce cas, aucune erreur ne peut être reprochée
aux constructeurs et seule l'application de règles
spéciales pouvait éviter l'accident (T2, 42).
Cinéma Rialto
La salle comportait de longs pans en maçonnerie de moellons,
sans ouverture, supportant la couverture. Cette dernière
était constituée par une dalle en béton
armée suspendue à des arcs "bow-string"
appuyés sur la maçonnerie des longs pans par l'intermédiaire
de sommiers en béton armé. La secousse a désorganisé
la maçonnerie sous les sommiers et quelques parties du
mur sont tombées privant les "bow-strings"
de leurs appuis.
Ceux-ci sont tombés mais ne se sont pas cassés
au terme de leur chute ce qui est la preuve qu'ils avaient été
correctement projetés et très bien organisés.
Immeubles restés debout
- À Talborjt, le minaret de la mosquée,
solide construction d'excellente maçonnerie est resté
debout malgré son élancement.
- Le Cinéma Sahara de Talborjt a résisté
aux secousses malgré son balcon en porte à-faux
(T2, 44).
- En Ville nouvelle, l'Hôtel Marhaba, bonne et lourde
construction traditionnelle n'a subi que quelques dommages réparables,
bien qu'il soit non loin de la faille de Tildi dans une situation
à priori exposée.
2- Importance et respect de prescriptions
suivantes :
- Des règles concernant la liaison
des façades avec les refends ou avec les ossatures
permettent d'éviter les renversements de façade
et chute de planchers.
- Des règles relatives au chainage horizontal et vertical
des maçonneries permettent d'éviter les graves
fissurations et empêcher l'effondrement de bow-strings
comme au Rialto ou de la charpente de l'église Sainte-Croix.
- Prise en compte de coefficients sismiques pour éviter
le déversement du 2ème étage comme pour
le marché.
-Prescriptions relatives au porte-à-faux pour
éviter l'affaissement des rotondes comme au Sud-Building.
- Calculs des contreventements pour éviter ce
qui s'est produit pour le Saada, le Bella Vista, l'immeuble Consulaire.
- Délimiter les régions susceptibles d'être
frappées par un séisme et rendre obligatoires
des recommandations antisismiques pour ces régions.
- Le coût de la construction n'est augmenté que
d'environ 5% lorsque le nombre d'étages est compris entre
4 et 6 (T2, 50).
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Nous remercions M. Gérard Houlliez,
fils de M. Lucien Houlliez rédacteur du rapport
SECURITAS et responsable du suivi des travaux après le
séisme pour le compte de la Société Marocaine
des Entreprises Truchetet, Tansini et A. Dodin, de nous avoir
permis d'exploiter ce document technique.
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