Lahsen Roussafi
Ma vie

 

 

 Je suis né à Ihchach au Fendeq Chaffeî en 1939.

Je suis issu du couple formé par Ahmed et Fatima et je n'ai qu'une sœur Ijja née en 1941.

 

J'ai fréquenté les écoles coraniques, l'école musulmane de Talborjt et le lycée Youssef Ben Tachfine (YBT) d'Agadir jusqu'au séisme.

Après le séisme, j'ai poursuivi mes études à Rabat au lycée technique "Les Orangers" jusqu'à la fin de l'année 1961.
Après l'obtention du CAP, je me suis engagé sur le champ dans la plus grande entreprise des phosphates du Maroc, OCP à Khouribga.
Lors de mon examen pratique dans les ateliers électriques, le personnel marocain et français de l'entreprise se sont solidarisés avec le jeune rescapé d'Agadir que j'étais pour l'aider à réussir les tests ; je ne l'oublierai jamais.

 

 

 
 

 
En 1962-63, je fus muté à Youssoufia, ce qui me rapprochait d'Agadir où vivaient maman et ma sœur sinistrées.


Les concours et ma volonté m'ont permis, étape par étape, de parvenir jusqu'au poste de chef des installations minières.
J'eus maintes fois l'occasion de rencontrer le directeur général de l'entreprise qui était en même temps le premier ministre, M.Karim Lâmrani, quand il nous rendait visite.

 

L'Office Chérifien des Phosphates était une grande école, sa dynamique m'a permis d'avancer dans mes études, dans la connaissance … J'ai suivi des séminaires à travers le Maroc, et à l'extérieur.

J'ai participé également à la formation des futurs cadres.

J'ai permis d'améliorer les performances d'engins mécanisés que nous achetions en Autriche et ailleurs. Ce sont ces machines qui font les tunnels dans le monde entier.

Je n'oublierai jamais le déplacement de toute la hiérarchie Voestalpine venue constater l'amélioration de la productivité qui était passée de 30/35 mètres à 76 mètres d'avancement par jour.

 

J'ai effectué des déplacements en Autriche grâce à Voestalpine qui m'a permis de découvrir le pays en même temps que tout ce que l'entreprise fabriquait (paquebots, trains, voies ferrées …).

J'ai fait de même en ce qui concerne les performances de la jonction des tapis roulants, des revêtements des tambours, etc… venant d'Allemagne. J'eus plusieurs fois l'occasion d'aller dans leurs usines de production à Munich, Düsseldorf et Forbach pour échanger des améliorations obtenues sur le tas.

J'eus l'occasion aussi d'aller jusqu'au cœur des eaux des Vosges de renommée mondiale.

Nous recevions souvent pour des visites guidées des jeunes filles et des jeunes ingénieurs du Maroc qui avaient choisi d'encadrer les diverses mines que possède le Maroc.


 
 

 
Pour me maintenir en forme, je pratiquais plusieurs sports : le football, le tennis, l'haltérophilie, le vélo de course et le footing sur 18 km chaque dimanche tôt le matin.
Avec mes deux amis favoris (dont un rescapé qui fut interne à YBT), on chapeautait des équipes de hand de filles et de garçons, équipe de foot, l'Association des cadres pour séjourner à Agadir, Marrakech, Cascades d'Ouzoud, Walidia, Essaouira … L'entreprise assurait le financement ainsi que le déplacement par ses cars.

 
 
 

 
En 1990, je fus désigné pour conduire une équipe d'ouvriers et cadres au pèlerinage à la Mecque.


Ma carrière se termina en 1992
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Je me rendis en France pour visiter mes correspondants. J'avais commencé une correspondance en CM1, de 1955 jusqu'à ce jour, avec des Français de la région d'Amiens (Méricourt sur Somme) et de Cambrai. J'avais aussi parmi mes correspondants un Togolais, une Grecque et une Belge.

J'avais réussi à garder leurs correspondances, récupérées parmi les décombres 8 jours après la fermeture de la zone sinistrée.
Avec mon épouse Aïcha, nous avons visité le Nord de la France dont les grottes de Naours qui servirent lors des guerres depuis la IIIème siècle. Ces galeries souterraines creusées sur une centaine de kilomètres avec église, places, moulins, forgerons, étables pour animaux, constituent un exemple extraordinaire de ville souterraine créée pour survivre.

Le fils de mon correspondant étant devenu maire de Méricourt sur Somme, nous fûmes invités à assister aux feux de la Saint-Jean, à la célébration d'un mariage. Ce fut l'occasion de côtoyer les habitants et de leur parler du Maroc, de ma ville Agadir, et de mon village Ihchach.


Chez Gisèle, la mère de Franck Beauvarlet, maire de Méricourt, je n'ai pas pu retenir mes larmes en voyant toutes mes lettres de correspondances conservées intactes depuis les années 50. Je ne me souvenais pas avoir envoyé autant d'objets artisanaux ni comment ? Je remercie vivement encore cette famille.

J'ai ensuite déposé une plaque en marbre façonnée à Agadir, sur la tombe de mon correspondant (d'Airbus) qui est décédé alors qu'il se préparait à venir me retrouver pour la première fois à Agadir, juste un mois après qu'il eut pris sa retraite. Il est enterré au cimetière de Fort-Mahon plage.

Lors de notre voyage en Europe avec mon épouse Aïcha, nous nous sommes rendus en Hollande pour découvrir ce beau pays. La sœur d'Aïcha et son époux nous ont conduits partout sur le sol néerlandais.

Nous avons renoncé à nos billets d'avion pour le retour pour faire le chemin terrestre par la Belgique, la France et l'Espagne.

J'ai maintenant une idée du rocher de Gibraltar.

Actuellement je consacre mon temps à écrire sur mon Agadir et particulièrement sur mon village autochtone. Avec des amis gadiris, nous avons édité 3 ouvrages en arabe et en français portant sur les Mémoires d'Agadir au XXe siècle.
Depuis quelques années, je fais partie d'une superbe équipe (Marie-France Dartois, Régine Caïs-Terrier) qui s'attelle à mettre à la disposition de tous les Mémoires des quartiers et cités d'Agadir bien avant leur création et au-delà de leur destruction par ce terrible séisme du 29 février 1960.

Je milite maintenant pour que les Mémoires de mon Agadir ne s'effacent pas auprès des responsables et des élus qui se succèdent dans cette ville depuis le séisme.
Sans ce destin de février 1960, je pense que je n'aurai jamais eu l'occasion de vous présenter cette biographie riche et restreinte à la fois.


Lahsen Roussafi