Ecole Bosc

 Rue de Paris

 Boulevard Delcassé

 Rue d'Athènes

 Rue de Bruxelles

 

 

L'Ecole Bosc

 

 
L'école Bosc de la VN (Scuila Iroumine pour les Marocains) se situait sur un terrain clos bordé par quatre rues : la rue de Paris, le boulevard Delcassé, la rue de Bruxelles et la rue d'Athènes.
 

 

Les premiers bâtiments de cette école furent créés à la fin des années 30 donnant sur la rue de Paris.
Il semble que Jean Bosc qui avait enseigné à l'école du bord de mer dans les années 30 ait pris ses fonctions de directeur en 1939 dans cette belle école blanche de la ville nouvelle.

Sur les photos de la fin des années 40, on voit bien le long bâtiment principal de l'école perdu au milieu des terrains vagues du fer à cheval.

Des ajouts se firent au premier bâtiment de l'école : ainsi celui de l'école maternelle au début des années 50, un étage en 1955 pour les classes de CE à côté du préau et de l'entrée de la rue d'Athènes (Régine Terrier).

 

Cette école publique dite "école européenne" était destinée aux enfants européens mais pas seulement.
Il y avait des enfants de couples mixtes, quelques enfants marocains et juifs jusqu'à l'Indépendance.
Les classes étaient mixtes (filles et garçons).
On ne portait pas d'uniforme, des tabliers parfois, comme on voulait.

Il y avait le bâtiment des classes primaires du CE1, CE2, CM1 et CM2 en enfilade et l'administration avec le bureau du directeur et sa coopérative, le bâtiment de la Maternelle à partir de 1951 donnant sur le boulevard Delcassé.
La grande cour de récréation donnait sur le bd Delcassé et une plus petite sur la rue de Paris.


Le jour de repos était le jeudi toute la journée. Ce qui autorisait le catéchisme le jeudi matin à Ste-Croix ou à Sainte-Anne (Quartier Industriel) et le cinéma l'après-midi au Vera-Cruz, tout au moins jusqu'à l'Indépendance. Dès la rentrée scolaire en octobre 1956, le repos du jeudi fut terminé, le jour de repos devint le vendredi.


Au début, l'entrée s'effectuait rue de Paris. M. Bosc y entretenait avec amour de magnifiques rosiers et des hibiscus rouges. Il y avait un parc à vélos sur la droite en entrant.

 Avant l'ouverture du Collège Youssef ben Tachfine, l'école assurait les cours de 6ème et de préparation au CEP, ces classes de fin d'études primaires disparaîtront progressivement à partir de 1959 avec la prolongation de la scolarité obligatoire à 16 ans
(souvenirs d'Alexandre Kaladgew).

 

 
 


Un cours d'arabe dialectal débuta en 1956-7, peut-être expérimental (une heure par semaine) et dans une seule classe de CM2. Le maître en costume, se tenait tout aussi droit que sa baguette d'école qu'il tenait en permanence à portée de nos doigts ou de nos aisselles. Le manuel d'arabe dialectal était celui de E.Cleemann, "Yallaho", de la classe de 6ème. Nous apprenions également l'histoire du Maroc avec un livre de Charles Penz ainsi que la Géographie du Maroc (souvenirs de Marie France Dartois).

 

 
 
 L'entrée de l'école se faisait dans une rue où à main droite, il y avait un terrain vague. C'était la rue d'Athènes. La sortie se faisait également rue d'Athènes et le car de "Kebir" attendait les élèves à l'angle de la rue d'Athènes et de la rue de Paris pour les emmener au QI
(souvenirs de Raymond Humeau).

Pour les élèves qui avaient un vélo, l'entrée se faisait rue de Paris.

 

Au coin des rues d'Athènes et du bd Delcassé, des petits marchands au plateau en bandoulière vendaient des friandises de toutes sortes, boîtes et tubes de coco, liche-liches, bâtons de réglisse à mâcher, escargots et barrettes de réglisse, gros caramels vendus à la pièce, bazookas roses et claquants.

(souvenirs de Régine Terrier, Dominique Mazet, Marie France Dartois).

image extraite du film "Agadir, La fille du soleil",
(images retrouvées par Abdallah Aourik
et transmises par Pierre Perrot)

 

Après le portillon de la rue d'Athènes, on entrait sous un préau avec des piliers blancs, préau principal de l'école.

À droite, il y avait un fronton (le mur d'une classe de CP), là où les filles envoyaient leurs balles sur le mur.
À droite, juste avant le grillage qui séparait l'école maternelle, il y avait les 2 classes de CP avec des lavabos-abreuvoirs et des WC entre les 2.
En face, la grande cour était goudronnée, c'est de là que Monsieur Bosc faisait l'appel et la répartition des élèves dans les classes, le 1er octobre, jour de rentrée scolaire.
À gauche de l'entrée et du préau, il y avait la cantine. Cette cantine était mal agencée au début car aménagée dans une partie du préau, et les élèves étaient obligés de passer par là pour se rendre dans la petite cour. Cette cantine fut refaite avec un couloir pour le passage des élèves lors de l'ajout du bâtiment en hauteur ayant un escalier externe.


Dans le prolongement de la cour principale, il y avait le terrain de sport. On y rentrait par la gauche, face à un portique avec des cordes à grimper. Sur la droite, le sautoir, plus loin la barre fixe et dans le coin opposé des barres à escalader. Pour rejoindre la classe de Mme Mignot en 1953-4 qui se trouvait dans l'autre cour, il fallait traverser le terrain de sport et longer les poulaillers derrière le bâtiment principal.


La deuxième cour était en terre battue. Elle avait son préau et ses WC. Il y avait aussi la classe de Mme Ginet et la classe des CP. Au fond et à droite, l'infirmerie. C'est dans cette cour que se faisaient les photos de classe.


Donnant sur le préau, il y avait le bureau de Monsieur Bosc avec sa coopérative (plumes, gommes, crayons, cahiers, etc)
(souvenirs de Raymond Humeau).

 

 
 

Dans la salle de classe de CM2 qui se trouvait au rez-de-chaussée, on voyait au fond le bureau du maître sur une estrade en bois qui craquait au moindre pas avec derrière lui et sur le côté droit un grand tableau noir et un assortiment de craies.
Sur le côté gauche des rangées de fenêtres et à droite une grande carte de géographie du Maroc.
Les pupitres en bois avec bancs accueillaient 2 élèves non attitrés. A chaque extrémité des pupitres, des trous dans lesquels étaient enfilés des encriers en porcelaine blanche contenant une encre violette âcre. On se servait de porte-plume et de plumes "Sergent-major" ou "La Gauloise".
Certaines grattaient et faisaient des paquets et les doigts portaient souvent les traces des difficultés rencontrées. Sous les pupitres, on trouvait toutes sortes de souvenirs dont des chewing-gums collés. Il fallait se ranger par deux et faire silence avant de rentrer en classe, ensuite le maître faisait l'appel des noms dans la classe. La maxime du jour était inscrite au tableau. Une sonnerie retentissait pour annoncer la fin des cours.

 À la récréation, on échangeait des buvards publicitaires,
des images de pierres précieuses
des chocolats Poulain ou Suchard à coller sur un album.

 

 
 

 

Parmi les jeux, la période des abricots (mechmech, lmechmach) donnait lieu à une intense activité de collection de noyaux précieux dans des petits sacs.

Des noyaux, on faisait des sifflets mais surtout on inventait quantité de jeux où les abricots remplaçaient les billes.

On tenait boutique le long du mur de l'école.
 

 

 

À la récréation, jeux de gendarmes et de voleurs, ballon prisonnier, cache-cache, colin-maillard, ronde du foulard, jeux d'osselets, de billes et de toupies, Chicha la Fava et jeu de l'ours, jeux de balle, de marelle, de corde à sauter autour du grand eucalyptus de la cour.
 

 Le jeu de la poupée molle avait été interdit. C'était un jeu de filles qui se jouait à trois. Celle au milieu faisait la poupée molle qu'on ballotait de droite à gauche
(souvenir de Gisèle Costa).

 

 


 

Les filles étaient surtout expertes en jeux de balle sur le "mur de rebond", 3 balles pour les plus douées en chantant :
" À la balle, jolie balle, au ballon, joli ballon.
À la balle St Antoine,
au ballon Christophe Colomb " : ceci effectué avec 2 balles 2 mains-1 main-l'autre-sur un pied-l'autre-avec taper 2 mains-taper une main-l'autre-rebond mur-rebond sol, etc., complexifié avec des tapés et tours complets sur soi. Sur " notre " mur, le fameux un-deux-trois-soleil !
(souvenirs de Marie-France Dartois, Dominique Mazet, Régine Terrier).
 

 

 

 

 
 

D'autres s'exerçaient à faire les pieds au mur et parfois des superbes roues en travers de la cour pour lesquels il valait mieux porter des pantalons.
Les filles jouaient à la corde à sauter (une corde, deux cordes en croisant) en chantant :
"À la soupe, soupe, soupe, au bouillon, ion, ion,
la soupe à l'oseille c'est pour les demoiselles,
la soupe à l'oignon c'est pour les garçons ",

et à la marelle (2 sortes de marelles) à droite des escaliers près des arbres.

Il y avait aussi les gages des coins-coins (tenir jusqu'à 20 sur un pied, faire une grimace, pincer ou toucher un garçon pour les filles) à partir des pliages que l'on confectionnait et actionnait à 2 doigts.

 

Les garçons avaient des jeux bien plus violents.

L'entrée des petits de la Maternelle ( Madame Bories, directrice) se faisait du côté du boulevard Delcassé, bordée par une murette et des faux-poivriers, par une porte qui donnait sur un long couloir avec des porte-manteaux sur la gauche.
Un autre couloir perpendiculaire au premier partait de part et d'autre de grandes baies vitrées qui donnaient sur la cour. La cour était délimitée par un grand grillage. Les petits de maternelle ne se trouvaient pas en récréation en même temps que les grands.

Sur la gauche, au fond du couloir il y avait la classe des moyens et des grands. Les moyens avaient des jeux qui leur étaient réservés et un tableau sur lequel ils travaillaient avec la maîtresse. La sieste des petits s'effectuait les bras repliés sur les table
s (Souvenirs de Cathy Fetiveau).

 En ce temps-là, dix bons points donnaient droit à une image et dix images à une sucette Navarro
(souvenirs de Pierre Perrot).

 

 

 

Dans la cour, du côté de la rue d'Athènes, il arriva un jour que quatre petits marocains de l'école de M. Simon de Talborjt qui avaient repéré des énormes oranges navel succulentes qu'une seule main ne pouvait contenir, se mirent à sauter la murette et se firent prendre par le directeur en personne le terrible Monsieur Bosc qui leur répéta en leur frictionnant les oreilles : " Ces oranges sont les rouges à lèvres de mon école !! ".

Trois jours plus tard, quelle ne fut pas leur surprise d'entendre leur institutrice Mme Coëffic de l'école musulmane de Talborjt évoquait orange et rouge à lèvres en cours d'instruction civique.

Quand il arrivait à ces enfants de croiser M. Bosc - qui n'oubliait pas de les surveiller dans les parages de l'école - ceux-ci n'oubliaient jamais de le saluer :
 

 

" Bonjour, M. Boss ". Monsieur Bosc répondait sans sourire. Ils apprirent plus tard qu'il s'appelait M. Bosc et le surnommèrent " Bougaille " (ce qui signifie forte tête en berbère)
(souvenirs de Lahsen Roussafi).

Quelques enseignants des années 50

 

Les photos de classes
de amidagadir

merci à Pierre Perrot, Henri Ballato, Raymond Humeau, Dominique Durand pour cet album.

 


 

Mohamed Dalhi

 

 Le tableau ne serait pas complet si nous ne parlions pas de Mohamed Dalhi le cuisinier de l'école Bosc, homme à la mémoire prodigieuse qui se souvient encore en 2012 du nom et prénoms des élèves.
Il était surnommé l'homme "faitout" de l'école.
Mohamed Dalhi, toujours en taguia blanche et blouse bleue, servit à l'école Bosc de Talborjt puis à la cantine de l'école de la Ville Nouvelle jusqu'au séisme et prit sa retraite en 1986 à l'école Gauguin.
Il fut aidé par Ahmed Argha, par Lahoucine qui devint par la suite photographe au Palais royal de Rabat et par une femme dont on ne souvient pas du nom.
Pendant les 3 mois de vacances scolaires (de juillet à septembre) l'école servait de colonie de vacances. Deux ou trois personnes étaient recrutées à cette occasion.
 

 

Le voici en compagnie de
Lahsen Roussafi en 2012.
 
 

 

Dalhi s'occupait d'organiser les travaux donnés aux prisonniers qui venaient seuls, sans escorte et à pieds depuis la prison de Founti pour entretenir le jardin, casser du bois pour la cuisine, faire du balayage et d'autres petits travaux.
Ce genre de travail était très prisé des prisonniers qui prenaient ainsi leur repas de midi à l'école et rentraient avec un supplément pour le dîner.


Chaque jour, Dalhi devait préparer 70 à 80 couverts.
Il utilisait des plats séparés pour ceux qui mangeaient le hallouf d'un côté et pour les marocains musulmans et juifs d'autre part.
Il recevait les consignes de M. Bosc et tenait un planning et des menus comme au restaurant.
Le fournisseur était M. Marin à l'immeuble Cassou, puis au marché de la VN puis au marché du Quartier Industriel en ce qui concernait les légumes secs et les épices.

Le pain était fourni par Navarro, au début en carriole.
M. Bosc s'occupait des achats, puis les confia à Mohamed Dalhi en 1957-8.
Les viandes (poulets, lapins, porcs, cheval, bœuf et mouton) étaient achetées chez M. Ahmed au marché de la VN.
Le poisson était fourni par M. Esclapez (famille Marin).
 Tout ce qui était frais (légumes, viandes, poissons) était livré et utilisé le jour même et non stocké dans les frigos de l'école.
 

Mohamed Dalhi était le monsieur "faitout" de l'école Bosc mais également l'homme de confiance.

Il avait une procuration pour retirer les courriers des enseignants à la Poste et à la Douane.
S'il fallait ouvrir une porte dans l'établissement c'était à lui qu'on faisait appel.

C'était le monsieur faitout et passe-partout grâce à un outil qu'il avait lui-même fabriqué.
Il était aussi l'homme d'entretien de l'école, réparant tout ce qui touchait à l'électricité, à la menuiserie (portes et tables), aux vitres brisées et aux toilettes bouchées grâce à son équipe de prisonniers.

Dalhi apprit beaucoup au contact de Jean Bosc et vice versa en inculquant à ce dernier le virus de la chasse et de la pêche.

Après de nombreuses années au service de l'école, Dalhi, le chef cuisinier reçut un Ouissam précieusement gardé et une machine à coudre de chez Cyprien Pourtau
(souvenirs de Mohamed Dalhi et de Lahsen Roussafi).

Mohamed Dalhi a échappé au tremblement de terre et aux ans qui passent.