La rue Tamri se situait
entre la Place du Pacha et la rue du Fondouk.
Elle n'avait pas une très grande activité commerciale,
quelques petits boutiquiers (Ibqaln en berb. ou Beqala
en ar. dialectal), un cordonnier, un vendeur de fournitures scolaires,
un marchand de charbon, un bureau de tabac et dans le bas de
la rue vers la rue du Fondouk et celle de Chaaba, des cafés
maures pour les pêcheurs, les maçons, pour ceux
qui travaillaient dans les carrières ou à la construction
du port.
Mais la rue Tamri, comme sa soeur jumelle la rue Doukkali, longeait
le mur de l'École musulmane de garçons dirigée
par Charles Simon (" Monsieur Simon " disait-on
avec déférence, " un des phares de mon
enfance " dit Michel Coeffic).

Le portail métallique
de l'école donnait dans la rue Tamri.
En haut de l'école se
trouvait la villa du directeur construite à la fin des
années 30 tout à fait indépendante, qui
possédait un jardin avec toutes sortes d'oiseaux dans
une volière et des animaux dont une gazelle, des marcassins
et autres gibiers.
L'entrée de la maison
et son garage se trouvaient rue Tamri en haut de la rue du Four
mais la maison avait une autre entrée rue Mesfioui.
Un aigle blessé y serait
resté des années, selon Michel Coeffic et Lahsen
parle d'un faucon de chasse (ayant appartenu au pharmacien de
la rue de la Mosquée) qui en fonction d'un dispositif
spécial pouvait voler sans s'échapper. Le jardin
était soigneusement entretenu par Lahoucine Kanik (91
ans en 2011).
M. Simon permettait à ses élèves méritants
de visiter son " zoo " à tour de rôle.
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L'école fut construite
en deux temps ; la première partie (en même temps
que la villa) fut ouverte en 1939. La deuxième partie
fut construite au cours de l'année 1953.
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1947 CM1 et CM2 Charles
Simon instituteur et directeur, Mohamed ez-Zaïni dit Ntabihou
et Sami Moulay Abdallah dit Aya Samt, instituteurs d'arabe.
Coll. Hadj Bernis Ali.
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Cette école
disposait d'une cantine.
La nourriture était préparée dans une cuisine
sous les escaliers par Lahoucine aidé par Mohamed El Haraoui.
De grandes tables étaient dressées sous le préau
où Lahoucine servait la nourriture dans des assiettes
en aluminium à partir d'une énorme marmite métallique
blanche dans laquelle il puisait avec une louche géante.
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Tous se souviennent avec délice de la ration de 500 grammes
de pain Navarro et de la barrette de chocolat.
La nourriture était à base de vermicelles, de riz,
tantôt de lentilles et de pois chiches, le tout était
très rouge, pimenté et bien huilé.
M. Simon supervisait personnellement la distribution pour donner
du " rab " aux bons élèves et priver
de supplément les mauvais élèves, les indisciplinés,
ayant toujours sur lui une liste de ces élèves.
Monsieur Simon était la rigueur même, à cheval
sur la propreté des classes, des deux cours de l'école
et des toilettes.
Lahoucine avait fait sien le
bon fonctionnement de cette école. Il était de
toutes les tâches. On le voit figurer sur une photo de
classe avec les élèves en 57-58.
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Il était connu pour sa
"gentillesse, son humanité, son sens de l'humour".
Lahoucine avait une façon de se déplacer marchant
avec un "rythme et cadence de tourterelle" impossible
à imiter, bavardant et chantant en berbère. (Souvenirs
de Ph. Balanger).
Dans une classe près de
la cuisine, M. Simon projetait des films muets de Charlie Chaplin.
Dans cette classe, on imprimait sur une imprimerie à poinçons
la meilleure des narrations après sa correction collective.
L'institutrice, Mme Faccio, avait appris aux élèves
à utiliser une pomme de terre coupée en deux pour
dessiner sur la coupe le décor à ajouter aux textes.
Au bout des écoles se trouvaient les logements de fonction
des institutrices. Le long du mur de séparation des trois
logements des institutrices, un gazon épais permettait
la mise en uvre de la leçon de botanique. Chaque
élève avait sa boite de conserve avec graine et
plante dont il suivait l'évolution chaque matin à
la loupe.
Mme Coeffic et ses enfants Michel et Joël occupaient l'appartement
avec jardin et côté rue Doukkali, Mme Faccio "la
mordue de violon" occupait celui du milieu et Mme Travers
"la mordue de tennis" grande amie d'une autre institutrice
bien connue Mme Richy, l'appartement qui se trouvait du côté
de la rue de Tamri.
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Mme Faccio qui fut l'institutrice
de Lahsen Roussafi en CM1, le recevait chez elle, le dimanche
matin, pour l'aider en français. Lahsen se souvient de
son jardin plein de géraniums et de son chat Minou le
Corse.
Une photo prise par Mme Faccio
en 1955 montre Lahsen avec sa belle bicyclette de marque St Étienne
et Minou le Corse dans son jardin.
" Les années passent, les souvenirs restent
" nous rappelle Lahsen Roussafi.
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