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Fatna Azzi et son mari
habitaient Ihchach, rue 17, en face de la famille du cordonnier
Da Mohamed Ou Hamou.
Fatna était femme de salle
à l'hôpital Mohamed V (ex-Hôpital Lyautey).
Elle travaillait de nuit avec Thérèse Blondeau,
infirmière diplômée, et un garçon
de salle qui s'appelait Soussy, tous les trois chargés
des étages 1 et 2.
Cette nuit du 29 février 1960, au cours du séisme,
ils avaient pu tous les trois faire sortir tous les malades dont
ils s'occupaient, environ 150 hommes et femmes, des malades et
des personnes récemment opérées. Certains
pouvaient se déplacer, mais d'autres avaient besoin d'être
tirés, débranchés, transportés.
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L'électricité était
coupée. Il fallait utiliser des pansements comme torches.
Il avait fallu plus de vingt aller et retour pour sortir tous
les malades de ce bâtiment chaotique. Ils se déplaçaient
dans un fracas d'apocalypse, de respirations asthmatiques ; le
sol se dérobait sous leurs pieds ; ils recevaient les
murs, les vitres, les faux plafonds en avalanche. Quelques 20
minutes plus tard, suite à une autre secousse, les salles
et une partie de l'hôpital étaient par terre.
Ils se sentaient dans cette immense cour de l'hôpital vraiment
seuls au monde. Ils ne leur restaient que des prières
faites ensemble.
Lahsen Roussafi a cherché
et retrouvé Fatna Azzi bien des années après
le séisme.
"Par la grâce de Dieu, dit-il, et l'effort conjugué
de mon unique sur Ijja (rescapée du séisme),
nous avons pu retrouver l'emplacement de sa maison à Ihchach
et Fatna Azzi encore en vie. Elle a 80 ans mais aujourd'hui elle
est paralysée et parle très, très peu".
Ce 29 février 1960, Fatna avait emmené avec elle
sa fillette de trois ans qui n'avait pas voulu rester avec son
père à Ihchach. Cette nuit-là, Fatna perdit
son mari et le reste de sa famille. Mais Thérèse
Blondeau ne savait pas que Fatna était enceinte et que
Fatna mettrait au monde un garçon qui porterait le même
prénom que son père Wissaâdène. Ce
fils a choisi aujourd'hui le même métier que son
père : électricien.
Après cette nuit horrible à secourir les gens de
l'hôpital, Fatna se rendit à Ihchach le lendemain
matin vers 9 heures pour apprendre que personne de sa famille
n'était en vie. Elle ne reconnut pas sa maison : tout
était aplati.
Cette femme courageuse repartit à zéro pour élever
sa fille et attendre la naissance "d'un fils du séisme".
"J'ai rendu hommage à
Fatna Azzi, dit Lahsen, et je lui ai dit que bientôt un
demi-siècle se sera écoulé depuis ce drame.
Je lui ai dit que beaucoup
de nos lecteurs seront avec elle pour son humanité, son
courage, alors qu'elle était enceinte.
Je lui ai dit : nous sommes
avec toi alors que tu es paralysée aujourd'hui".
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Sa fille toute
jeune qui était avec elle ce 29 février 1960, travaille
maintenant à l'Hôpital Hassan II dans le Service
Maternité.
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M. Soussy est décédé en 2005 à Agadir.
" Merci Fatna Azzi pour ce que tu as fait et merci à
tous les autres secouristes ". Lahsen Roussafi.
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