Avec Talborjt 1930-1960 et Agadir
Ville-Nouvelle 1930-1960, le Quartier Industriel d'Agadir
(QI) complète provisoirement la trilogie de cette
ville, dans son développement entre 1930 (Agadir décrétée
municipalité) et le séisme du 29 février
1960.
Le Quartier Industriel fut créé par la Municipalité
d'Agadir, pour répondre aux besoins des industriels face
au développement de la ville et des conserveries. Le petit
quartier industriel d'Anza ne pouvant suffire, par manque de
place, le nouveau quartier industriel fut bâti à
la fin des années 40 en dehors de la ville, en direction
d'Inezgane.
Jusqu'en 1940, à l'emplacement de ce quartier prospérait
une lande d'euphorbes tikiout fréquentée par les
hyènes et les chacals. Quelques terrains ayant appartenu
aux Mesguina étaient encore partiellement cultivés.
Ce nouveau quartier était contenu par
des frontières naturelles,
- au nord du côté de la Ville
nouvelle : la zone du petit oued Laârib (oued des Arabes
sahraouis) parallèle à la rue Turgot,
- à l'est : les collines avec les carrières
et les fours à chaux,
- au sud : l'oued Lahouar et son ravin,
- à l'ouest : l'avenue Jules Cambon
et les dunes.
Le tout formait un quadrilatère presque
parfait divisé en deux parties : d'un côté
les conserveries à l'est, de l'autre les habitations
ouvrières à l'ouest, entre les deux des terrains
vagues faisant tampon.
Une des premières constructions de ce quartier fut celle
des Éts De Saint-Meleuc qui obtinrent en mars 1937
l'autorisation d'installer un distributeur d'essence avec réservoir.
En 1946-47, les Abattoirs d'Agadir seront construits au
QI lui donnant le nom de L'Battoir qui perdure.
Par la suite, la plupart des entreprises de construction, les
entrepôts et dépôts de matériaux de
toutes sortes, les menuiseries, les grossistes, les garages,
les carrosseries, les parcs et entrepôts municipaux, les
conserveries s'installeront au Quartier Industriel.
Les conserveries
(partie haute du QI), une cinquantaine d'usines, seront construites
en un temps record entre 1948 et 1951 (cf. le chapitre consacré
aux Conserveries).
La cité ouvrière, largement séparée des conserveries,
fut construite au début des années 50 (cf. le chapitre
consacré aux Cités). Bien pensée pour répondre
aux us et coutumes des populations marocaine et européenne,
elle était cosmopolite. Elle devint quasiment autonome
avec ses commerces de proximité (boutiques d'alimentation,
fours beldi, bouchers, boulangers-pâtissiers, coiffeurs,
couturiers, deux pharmacies, etc.), son petit marché permanent
rue de Meknès, le souk El Had qui était déjà
le souk du samedi, son cinéma Salam, ses lieux de culte
(zaouyas mais pas encore de mosquée à minaret,
une chapelle paroissiale Ste-Anne pour les catholiques, nous
n'avons pas trouvé trace de synagogue avant le séisme),
son club de boules, un hammam, un centre de santé, des
écoles musulmanes pour garçons et pour filles,
un orphelinat dans l'ancien lazaret, le Tribunal de première
instance, la Sûreté Nationale. En dehors de quelques
gargotes exploitées par des Marocains, il n'y avait que
deux petits cafés tenus par des Français (L'Oasis
et Le Cambon), un hôtel café restaurant Le Relais
dirigé par un Français.
Il n'y avait pas encore d'établissement bancaire, ni d'agence
immobilière en dehors du Groupement Foncier Marocain.
Le Quartier Industriel avait tout juste dix
ans quand survint le séisme. Des blocs d'immeubles trop
abîmés ou difficiles à intégrer dans
le nouveau plan d'urbanisme furent rasés. Les dégâts,
cependant moins importants qu'ailleurs, permirent de mettre en
place des cités d'urgence pour reloger rapidement les
rescapés du séisme et permirent de relancer l'activité
industrielle.
Les conserveries marquèrent profondément la vie
de ce quartier à tel point que le nom de ces dernières
est devenu le nom des ouvriers qui travaillèrent dans
ces usines. Il en est ainsi des Sapca, des Guichard et d'autres
encore.
Le QI est maintenant en passe de devenir un grand quartier d'habitation.
En 2013-14, les conserveries encore en activité sont rares
et quittent ce quartier pour la nouvelle zone industrielle des
Aït Melloul. Les bâtiments des anciennes conserveries
tombent pour la plupart en ruine et sont progressivement remplacés
par de luxueuses résidences. Il en est de même,
hélas, du Cinéma Salam, uvre de l'architecte
Appéré, dont l'architecture n'est pas sans rappeler
celle des conserveries et qui, triste témoin de ce passé
récent, est à l'abandon.
À partir de cette présentation
succincte, il vous sera loisible de vous aventurer dans ce quartier
qui fut le Quartier Industriel d'Agadir en circulant comme il
vous plaira dans ses rues, vous arrêtant pour découvrir
et explorer des lieux ignorés ou enfouis au fond de vos
souvenirs, ou pour découvrir qui furent ces femmes et
ces hommes qui bâtirent ce quartier et la ville, contribuèrent
à son développement économique, et qui instruisirent
et soignèrent les enfants d'Agadir.
Nous sommes à votre disposition
pour effectuer les corrections nécessaires à ce
travail et nous vous remercions à l'avance pour les informations
nouvelles que vous pourriez apporter.
Février 2014, Marie-France Dartois
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