Comparaison des effets du séisme avec les structures tectoniques

 

 
Le Maroc est situé dans une zone de collision continentale dûe au rapprochement des plaques tectoniques Afrique-Europe dont les contraintes sont principalement absorbées par la chaîne atlasique et le Rif.

Agadir se situe sur le versant Sud et à l'extrémité occidentale de la grande chaîne atlasique (Haut Atlas ou Atlas saharien) qui de l'Atlantique au golfe de Gabès traverse toute l'Afrique du Nord.


La ville se trouve placée sur l'accident tectonique portant le nom d'accident sud-atlasique qu'on peut suivre du golfe de Gabès à Agadir.
Cet accident traduit à cet endroit la discontinuité qui sépare la chaîne du Haut-Atlas reprise par les mouvements alpins, de l'Anti-Atlas zone à substratum précambrien rigide appartenant au bouclier saharien.
 

 

 

Accidents principaux de la région d'Agadir :

Aux environs d'Agadir, l'accident sud-atlasique se divise en 2 branches qui sont des flexures (brusques changements de pendage selon une surface déterminée sans rupture).
Les grands accidents tectoniques de la région d'Agadir sont principalement les deux grandes flexures qui limitent la zone pré-atlasique méridionale définie par R. Ambroggi, ingénieur géologue :

- Flexure nord-atlasique (accident sud-atlasien)
- Flexure sud-atlasique (accident pré-atlasien méridional)

Ces deux accidents, nous dit Ambroggi, se confondent par endroits, jalonnent sur 2.000 km la bordure méridionale du Haut-Atlas marocain et de l'Atlas saharien d'Agadir à Gabès ; ils se prolongent sous l'Océan atlantique en direction des Iles Canaries, témoins volcaniques qui ont connu des éruptions au cours des siècles passés (R. Ambroggi, Rapport géologique, mars 1960, Séisme d'Agadir (29 février 1960 à 23 h 41), 1961.

Ces accidents de direction générale ENE-WSW se présentent sous forme de flexures de style tectonique souple. Ils se sont amorcés lors du soulèvement du pli de fond atlasique et sont encore vivants.
 

 
 

 

Accidents secondaires :

Contrairement aux accidents principaux précédents, ces accidents plus récents se présentent sous forme de failles (cassures dans l'écorce terrestre accompagnées d'un mouvement relatif (jeu) des deux compartiments qu'elles déterminent), orientées NE-SW, de largeur faible entre les lèvres (maximum de 1 à 5 m.). À Agadir même, la flexure sud-atlasique est compliquée par un système de failles ou failles des sources d'Agadir ou failles du Tildi (Duffaud, p. 6).
Ces failles sont localisées dans la zone pré-atlasique méridionale décrite par Ambroggi.

Ce sont d'Ouest en Est :

- La faille de la Kasbah
- La faille du Tildi
- La faille du Lahouar

La première des failles obliques (SW-NE) qui affecte cette région est la faille de la Kasbah qui coupe l'anticlinal du même nom au niveau du village d'Adouar.
La seconde est la faille du Tildi qui traverse de part en part l'anticlinal des Aït Lamine.

Ces accidents ont pour effet de couper et de décrocher les deux accidents principaux ainsi que les axes tectoniques de la zone pré-atlasique. La conjugaison de ces 2 systèmes d'accidents entraîne le découpage de la zone pré-atlasique en 3 secteurs d'Ouest en Est :

- Le secteur occidental des Aït Lamine
- Le secteur central d'Anounfeg
- Le secteur oriental de Tagragra

La faille de la Kasbah commence à 2 km au nord de la Kasbah et se poursuit en direction de l'Atlantique au SW en passant par le col de la Kasbah, au voisinage immédiat d'Igoudar et vient recouper en mer la pointe turonnienne du port d'Agadir.

La faille du Tildi a son origine à l'Adrar n'Oulma (secteur occidental de l'anticlinal du Lgouz), se poursuit en direction du SW, franchit l'Assif Assersif, atteint l'Oued Tildi et ce confond avec lui jusqu'à son embouchure. Elle passe par le quartier de Yachech et constitue la limite entre le Quartier Administratif et la Ville Nouvelle d'Agadir.

La faille du Lahouar est jalonnée par l'Oued Lahouar orienté NE-SW depuis son origine à Agadir Lrhazi sur le flanc sud de l'anticlinal du Lgouz jusqu'au voisinage de son embouchure. Elle a une longueur visible de 10 km dans la zone pré-atlasique. Sa trace se confond approximativement avec la limite SE du Quartier Industriel.

L'âge de ces accidents a pu être déterminé avec précision dans cette région : formés au cours de l'orogénèse fin pliocène, ils ont rejoué à la fin du Villafranchien.


 

 

Anticlinal de la Kasbah


 Sur les flancs Nord et Sud du dôme de l'anticlinal des Aït Lamine compris entre l'Océan et la faille du Tildi, les couches sont ployées à la verticale.


Sur cet anticlinal sont construits les douars de Taddert, Igoudar, Aït Lamine (Tagadirt), Aït Chleuh, Ifourirène, Aït Mohand.



L'axe de l'anticlinal des Aït Lamine se complique vers le sud, du repli constitué par l'anticlinal de la Kasbah, très aigu et presque chevauchant sur la plaine du Souss.



Sur le rivage entre les pointes de Sahnoun et d'Aghezdis à 2 km au NW d'Agadir, le léger synclinal d'Anza affecte la voûte anticlinale d'Aït Lamine suivi au sud du brachyanticlinal d'Agadir-Kasbah ; large de 1 km, celui-ci s'étend sur 3,5 km de longueur depuis l'Océan en direction NE puis E.


Une faille parallèle prend en écharpe et décroche de 1.200 m en plan l'axe anticlinal ; au Nord de Talborjt, une autre faille de moindre importance décroche encore mais légèrement son axe.

Cet anticlinal, est surmonté en discordance par des placages de grès.

 

 

Destructions
Les destructions importantes produites par le séisme du 29 février 1960 qui était de magnitude modérée 5,7 sur l'échelle de Richter, sont en rapport avec ces accidents.
Les destructions majeures ont concerné la zone particulière dite "pré-atlasique" décrite par R. Ambroggi dans laquelle se trouvent les quartiers d'Anza, Aghezdis, Kasbah, Iachech, Founti, Talborjt et Quartier Administratif. Les quartiers de la Ville Nouvelle et du Quartier Industriel sont situés dans la zone synclinale du Souss. Le Front de mer débute dans la zone pré-atlasique et se poursuit dans la zone synclinale du Souss.

Les destructions ont été maximales le long de la flexure sud d'Agadir (accident pré-atlasien méridional) jalonnée au N (et d'E en W) par la pointe rocheuse du Port, la Kasbah, le ravin Nord de Talborjt, les maisons Nord de Yachech et au Sud par le ravin de Tildi (c'est-à-dire la faille de Tildi) " qui prend en écharpe la flexure et la coupe au biseau, la pointe du biseau étant matérialisée par Yachech " (Rapport Ambroggi).

 

Les destructions ont concerné l'anticlinal de la Kasbah, les quartiers d'Agadir adossés à la branche sud de la flexure et le village de Yachech adossé à cette flexure et à la faille du Tildi qui la relaie (G. Choubert et A. Faure-Muret, p. 64).
La zone synclinale du Souss semble avoir joué le rôle d'amortisseur, puisque les destructions n'ont été sensibles qu'au voisinage immédiat de la zone pré-atlasique.
La zone pré-atlasique a "encaissé" les secousses destructrices dans toute sa largeur (10 à 12 km du N au S) entre l'accident sud-atlasien et l'accident pré-atlasien méridional et sur une longueur de 15 km d'W en E.

Les deux accidents principaux : sud-atlasien et pré-atlasien méridional ont limité le séisme destructeur à la zone pré-atlasique.
Deux des trois accidents secondaires (faille du Tildi et faille du Lahouar) ont fait écran à la propagation des ondes longitudinales à l'intérieur de la zone pré-atlasique. Celle de Tildi en faisant des victimes, celle de Lahouar en les arrêtant.

Selon le Pr Rothé le séisme d'Agadir a été causé par un mouvement qui s'est produit à 2 ou 3 km de profondeur au sein de la zone pré-atlasique. Ce mouvement a entrainé une amorce de rupture le long de la flexure sud-atlasique qui a joué le rôle de charnière entre l'Atlas plissé et la fosse de subsidence de la plaine du Souss (Rothé, p. 15).

Ambroggi situe quant à lui l'épicentre du séisme, à la Kasbah même ou légèrement au S-W soit à l'intersection de l'accident pré-atlasique et de la faille de la Kasbah, très près du rivage.

La Kasbah fut détruite à quasiment 100%. Seules une ou deux constructions dont l'école résistèrent au séisme.

À Agadir, juste avant le séisme de 1960, on ignorait l'existence d'un tremblement de terre récent ou même ancien ayant pu affecter la ville. Le Pr. Rothé cite un document évoquant la destruction de Santa-Cruz en 1731 que G. Roux, ancien directeur du Service de Physique du Globe et de Météorologie du Maroc identifia avec Agadir (Von Hoff, 1840) Von Hoff écrit : 1731 (ohne Ang d. Tages). Ein Erdbeben verwüstet die Stadt Sainte-Croix in Marocco (d'après Verneur, Journal des Voyages, T XV, p. 50) (Rothé, in Le séisme d'Agadir et la sismicité du Maroc) (Rothé, in Le tragique bilan des séismes de 1960 incombe en grande partie à la mauvaise qualité des constructions).