Personnage hors du commun, c'est la personnalité
exceptionnelle de l'odyssée de l'Aéropostale.
Surnommé "l'Archange", ou encore "Le
grand" par Saint-Exupéry.
Né le 9 décembre 1901
dans l'Aisne.
Élevé en partie par ses grands-parents.
Pensionnaire à l'École supérieure professionnelle
d'Hirson. Intéressé par le dessin et la mécanique.
En août 1914, ses grands parents se réfugient
avec lui dans le Cantal et l'inscrivent au Lycée d'Aurillac.
Sa mère le récupère au bout de 3 ans et
il intègre le Lycée Voltaire à Paris.
1918, il réussit la 1ère partie du baccalauréat
mais échoue à la seconde et tombe gravement malade.
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Pilote considéré comme
héros de l'aéronautique et de l'aviation.
Figure légendaire de l'Aéropostale.
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1920-
Il devance l'appel sous les drapeaux et signe un engagement avec
l'armée pour 4 ans. Il fait ses classes au 4e Régiment
d'Observation et intègre le 34e Régiment d'Aviation
du Bourget qui lui permet de postuler à l'École
Militaire d'Istres qu'il rejoint en octobre.
1921- En passant les épreuves du brevet de pilote,
le moteur cale, l'appareil s'écrase entre les arbres,
Mermoz s'en tire avec une jambe et la mâchoire fracturées.
Une autre tentative de vol se solde par un capotage à
l'atterrissage. Au dernier essai, Mermoz obtient son brevet de
pilote le 9 février 1921.
1921- En mai, il est affecté à la 7e escadrille
du 11e régiment de bombardement de Metz-Frescaty et rejoint
la Syrie. Il débarque à Beyrouth
le 17 septembre 1921 et intègre la 54e unité de
combat.Toujours volontaire pour les missions périlleuses,
il tombe plusieurs fois en panne dans le désert.
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Au cours de l'une de ces pannes, il est sauvé
in extremis avec son mécanicien par une colonne de méharistes.
Le 24 avril 1922, il compte 600 heures de vol en 18 mois.
1923- Le 3 mars, il quitte le Moyen-Orient pour revenir
en France, décoré. Il bénéficie d'un
congé de longue durée pour soigner des crises de
paludisme.
Le 11 juin, il rejoint le 23e Régiment d'Aviation
dans une unité de bombardement avant d'être affecté
le 29 aout au 1er régiment de chasse. Mermoz intègre
la 7e escadrille du 2e groupe ce qui renforce son dégoût
de "la chose militaire" mais y fait des rencontres
marquantes dans les personnes d'Henri Guillaumet et de Victor
Étienne.
1924 : il est démobilisé en juin 1924.
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1924- 28 septembre
: il reçoit une proposition de contrat des Lignes Latécoère.
Comme tous les pilotes de la Ligne, Mermoz commence chez Latécoère
"les mains dans le cambouis" en tant que mécanicien
afin de parfaire ses connaissances techniques.
Après un examen de pilotage particulièrement hardi,
il est vivement réprimandé par Daurat, chef
d'exploitation chargé du recrutement du personnel qui
ne veut pas de fanfaron dans l'équipe.
Il est finalement accepté et affecté
en qualité de pilote sur la Ligne Toulouse-Barcelone,
aux commandes d'un Breguet 14, alors que la Ligne franchissant
les Pyrénées est un défi permanent pour
les avions de l'époque.
En 1925, il
retrouve par hasard à Paris, son ami Henri Guillaumet
qu'il convainc de postuler chez Latécoère.
1926 - Il prend en charge le Courrier sur la Ligne Casablanca-Dakar.
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Au cours de son 4ème vol, le
22 mai, il perd de vue dans la brume l'avion d'Éloi
Ville qui l'accompagne.
Victime d'une casse moteur, il est contraint
de poser son Breguet en bord de mer, dans une région insoumise
avec Sidi Ataf Ould ElBechir, son interprète
chleuh.
Après 3 jours de captivité et
de nombreux sévices, il est libéré contre
une rançon de 5 000 Pesetas.
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Après deux mois de congés sanitaires,
il rejoint son poste au Maroc où il retrouve ses amis
Guillaumet et Reine.
Trois semaines plus tard, de nouveau en panne, il échappe
de justesse à une nouvelle captivité en s'envolant
à la barbe des Maures, récupéré par
l'avion de secours piloté par Éloi Ville.
En octobre 1926, il retrouve Antoine de Saint-Exupéry,
ce dernier promu Chef d'Aéroplace à Cap Juby.
En novembre 1926, il sauve Éloi Ville qui
avait été contraint d'atterrir dans le désert.
En 1927, il participe avec Guillaumet, Reine et Léon
Antoine aux recherches et sauvetage contre rançon
de l'équipage de l'hydravion uruguayen piloté par
Larre-Borgès.
1927- Daurat informe Mermoz de la mise au
point définitive d'un Laté 26 qu'il compte engager
dans un raid Toulouse - Saint-Louis du Sénégal
avec la perspective de la traversée de l'Atlantique Sud.
Les pilotes Mermoz et Negrin sont pressentis.
Les 10 et 11 octobre, Mermoz et Élisée
Négrin réussissent le vol sans escale Toulouse
- Saint-Louis du Sénégal, à bord d'un
Laté monomoteur 26-2R baptisé "Spirit
of Montaudran" (Charles Lindberg vient de réussir
la traversée de l'Atlantique en mai de cette même
année). Ils réussissent le raid Toulouse-Dakar
(4 270 kms) en 23 heures et 30 minutes.
L'Amérique du Sud et la Cordillère
des Andes
1927-
Mermoz est nommé chef pilote à Rio de Janeiro.
Marcel Bouilloux-Lafont, président et fondateur de
la Compagnie Générale Aéropostale,
prend la suite de Latécoère après
son rachat de la Cie Générale d'Entreprises
Aéronautique ; il envoie Mermoz en tant que chef pilote
à Rio de Janeiro. Ce dernier embarque le 6 novembre à
bord du paquebot Groix afin de développer des nouvelles
liaisons en Amérique du Sud.
1928- en avril : contre l'avis général,
Mermoz réussit le 1er vol de nuit sur le tronçon
Buenos Aires à Rio de Janeiro, vol de 2 500 kms
au-dessus de territoires hostiles, sans relais radio ni terrains
balisés, véritable gageure.
Il développe les vols de nuit et cherche à franchir
l'obstacle majeur de la Cordillère des Andes.
1928- en aout, en compagnie du directeur général
de la Ligne pour le continent sud américain et de son
mécanicien Collenot, il entreprend de survoler
les régions inexplorées de l'intérieur du
Brésil. À l'aller, tout se passe au mieux mais
au retour, le moteur cale et Mermoz doit se poser en pleine foret
vierge et les trois hommes doivent se réfugier dans une
usine de tanin avant de recevoir un nouveau propulseur.
1929- Le 3 mars, lors d'un vol de reconnaissance, à
bord d'un prototype de Laté 25 immatriculé F-AIEH,
en compagnie du mécanicien Alexandre Collenot et
du Comte Henry de la Vaulx (président de la Fédération
Aéronautique Internationale FAI), une panne moteur oblige
Mermoz à atterrir sur un petit plateau légèrement
incliné à 3 000 m d'altitude. Comme l'avion poursuit
sa course, Mermoz saute hors de la carlingue, se jette contre
le train d'atterrissage et stoppe le Laté. Le mécanicien
Collenot descend à son tour, bloque les roues et répare
le propulseur.
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Dans un froid terrible, Mermoz avec
3 côtes cassées, réussit au bout d'une heure
à faire repartir l'avion et rejoindre Santiago du Chili
où il dépose le Comte de La Vaulx.
Au retour, le 9 mars, sans le Comte
de la Vaulx, Mermoz décide de franchir la cordillère
des Andes dans sa partie centrale, la plus difficile, semble
t'il à traverser pour un avion. L'appareil est pris dans
les courants ascendants, et quand le Laté 25 commence
à se faufiler dans les hautes vallées des Andes,
le vent est si violent que l'appareil risque à tout moment
de se retrouver plaqué et écrasé contre
la paroi rocheuse. Mermoz doit capituler et se poser sur un sommet
à 4 000 m d'altitude.
Lorsque l'avion s'immobilise, Mermoz et le mécanicien
Collenot peuvent évaluer les dégâts :
le train d'atterrissage est en partie brisé et une aile
est endommagée.
Ils envisagent d'essayer de rejoindre à pieds les hauts
plateaux chiliens mais cela représente une distance de
100 km environ. Dès lors, il ne leur reste plus qu'à
réparer et repartir. Collenot utilise tout ce qu'il a
sous la main : chiffons, fil de fer, et même des morceaux
de cuir de leurs vêtements. Plusieurs fois les tubulures
du moteur éclatent à cause du gel. Après
4 jours d'intenses souffrances, Mermoz parvient à arracher
le Laté de la montagne et à le faire descendre
en vol plané jusqu'à Copiapó.
1929- le 14 juillet,
Mermoz ouvre la ligne des Andes au Courrier postal avec Henri
Guillaumet à bord d'un Potez 25 et réalise
la 1ère liaison postale entre l'Argentine et le Chili.
Jusque-là, le courrier postal franchissait l'océan
à bord de navires avisos mis à la disposition de
l'Aéropostale par le gouvernement français d'où
une énorme perte de temps. La seule solution consistait
à assurer une liaison aérienne régulière
entre l'Afrique et l'Amérique du Sud.
Étant appelé en France pour procéder aux
essais d'un nouvel appareil, Mermoz laissera à Guillaumet
la succession des vols sur la Cordillère.
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Traversée de l'Atlantique-Sud
1930- En mai
avec le radio Léopold Gimié et le navigateur
Jean Dabry, Mermoz réalise sur Laté
28 de nombreux records en circuit fermé en vue de
développer la 1ère liaison aérienne entre
la France, Dakar et l'Amérique du Sud.
1930- 12 et 13 mai. Mermoz participe à la 1ère
liaison postale sur l'Atlantique Sud.
Le gouvernement ayant interdit toute tentative de survol des
océans aux appareils terrestres, c'est sur un hydravion
Latécoère 28.3 (Laté 28 équipé
de flotteurs) baptisé le "Comte-de-la-Vaulx"
en hommage à Henry de la Vaulx qui vient de disparaitre
dans un accident d'avion au New Jersey.
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Cest le même équipage
qui relie d'un trait Saint Louis à Natal au terme d'un
vol de 21 heures et 10 minutes. Le
record de distance en ligne droite pour hydravion est battu.
Cette fois Mermoz s'est passé de la traversée de
l'Atlantique par des navires avisos. Cependant, le retour est
chaotique ; après le terrible "Pot-au-Noir",
le moteur laisse échapper d'inquiétantes trainées
d'huile. Le Laté 28 doit se poser en mer et l'équipage
est rapidement recueilli par un navire français, le Phocée.
Quant au Laté, il sombre.
Loin de se décourager, Mermoz essaye de nombreux avions
et améliore son record en circuit fermé (8 460
km en 59 heures).
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1930- Mermoz épouse Gilberte Chazottes
Peu après son mariage, Mermoz est victime
d'un spectaculaire accident alors qu'il teste le prototype du
Laté 28.8 destiné à la traversée
de l'Atlantique Nord. Au-dessus de Toulouse, l'appareil se vrille
en tout sens. Mermoz à qui on a imposé un parachute,
ne parvient pas à passer les épaules dans la trappe
de secours. Il ne doit son salut qu'à la désintégration
de l'appareil.
Dans les années qui suivent, Mermoz ne cesse de tester
de nouveaux appareils et de battre des records de vitesse.
1931- Mars :
après la liquidation de son employeur, la Compagnie
générale Aéropostale, Mermoz se fait
le défenseur acharné des anciens propriétaires
de la Cie dénonce la situation faite à ses collègues
navigants dépourvus soudainement d'outils et d'emplois
ou qui ne sont plus payés.
Il considère que dans les conflits politiques qui président
à la naissance d'Air France en 1933 qui conduisent l'aviation
marchande de l'âge aventureux vers l'âge organisé
ne sont pas les conséquences normales d'une évolution
économique mais le fruit de la trahison des dirigeants.
Il adhère aux Volontaires nationaux
dont il sera le porte drapeau au défilé du 14 juillet
1935. Il est intégré par La Rocque aux instances
dirigeantes des Croix de Feu et multiplie les discours
et articles dans Le Flambeau, organe du mouvement.Après
la dissolution des ligues d'Extrême-droite en juin 1936,
il figure au nombre des membres fondateurs du Parti social
français (PSF)
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dont il devient vice-président ; il
sera inculpé de "reconstitution de ligue dissoute"
que sa disparition tragique classera par la suite en non-lieu.
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1932 -en fin d'année 1932, Mermoz fait la connaissance du constructeur français
d'avions René Couzinet qui vient de mettre au point
deux avions trimoteurs qui ont malheureusement été
détruits dans des circonstances dramatiques.
Couzinet envisage
d'en construire un 3ème ; les 2 hommes se lient d'amitié
et Couzinet propose à Mermoz de piloter
son nouvel appareil qui devrait prendre le nom d'"Arc-en-ciel".
Après le rachat de l'Aéropostale
par Air France, ce n'est qu'en 1933 que Mermoz pourra à
nouveau tenter la traversée de l'Atlantique-Sud.
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1933- le 12 janvier, Mermoz décolle
de l'aérodrome de Paris-Le Bourget, à bord de l'avion
trimoteur Couzinet 70 baptisé "Arc en Ciel"
pour rallier Buenos Aires.
Trois jours plus tard, Mermoz s'élance
au-dessus de l'océan et après 14 h 27 mn de vol
touche le sol américain. Le 22, il atteint Buenos Aires
ayant parcouru 12 600 kms en 56 heures.
Au retour, alors que l'appareil se trouve à 700 kms des
côtes africaines, son moteur gauche semble prendre feu.
Il faut le couper ; ce qui provoque un échauffement des
2 autres. Néanmoins, l '"Arc-en-ciel" arrive
à Dakar, puis accueilli triomphalement au Bourget.
Malgré ce succès, le gouvernement
et la nouvelle société Air France n'honoreront
pas les commandes de plusieurs avions de la Sté Avions
Couzinet. La France qui a ouvert la route, se voit dépassée
par les compagnies américaines et allemandes.
Cette trahison serait à l'origine de l'engagement politique
de Mermoz au sein des Croix de feu.
1935- Mermoz devient Inspecteur Général
d'Air France mais ne partage pas l'engagement de la Cie Air-France
en faveur des hydravions géants ; il milite pour des avions
terrestres plus légers et rapides.
La disparition de son ami le mécanicien Alexandre Collenot
avec tout l'équipage du Latécoère 301
"Ville de Buenos-Aires" le 10 février 1936
le marque profondément.
Entre 1930 et 1936,
Mermoz aura effectué 23 traversées de l'Atlantique-Sud
sur des appareils divers tels que les hydravions Latécoère
28.3, 300 et 301, Blériot 5190 Santos-Dumont et autres
appareils terrestres ; Couzinet "Arc-en-Ciel"
ou quadrimoteur Farman F.220.
1936- Le 7 décembre,
avec 8 200 heures à son actif, Jean Mermoz disparaît
à bord de l'hydravion quadrimoteur Latécoère
300 le "Croix-du-Sud" avec à son
bord, le copilote Alexandre Pichodou, le navigateur
Henri Ézan, le radio Edgar Cruveilher, le mécanicien
Jean Lavidalie.
Après un 1er retour à l'hydrobase de Dakar, à
la suite d'un problème de réducteur moteur, empêchant
l'hélice arrière droite de passer au grand pas,
après une réparation sommaire et un nouveau décollage
sous les yeux de Guillaumet alors chef de l'hydrobase,
le radio annonce régulièrement le message TVB.
Puis à 10 h 43, le radio lance le dernier message en morse
depuis le Croix-du-Sud : "Coupons moteur arrière
droit" ou "Avons coupé moteur arrière
droit" sans détail supplémentaire à
environ 800 kms de la côte africaine.
Malgré de nombreuses recherches, on ne retrouve aucune
trace de l'appareil ni de l'équipage.
La disparition de Jean Mermoz est vécue en Franc comme
une catastrophe nationale.
Six jours après, à la demande du gouvernement Blum,
sous la présidence d'Albert Lebrun, accompagné
d'un discours de Pierre Cot, ministre socialiste de l'Air : Jean
Mermoz et l'équipage de la Croix-du-Sud sont cités
à l'Ordre de la Nation :
"Sublime figure d'aviateur, d'une
valeur morale et professionnelle hors pair. Créateur,
aux prix d'efforts surhumains, de l'aviation commerciale transocéanique,
a fait de son nom un symbole et de sa carrière une longue
suite d'exploits. Allant jusqu'au bout de son entreprise, envisageant
la mort avec sérénité, a mérité
l'admiration générale par la grandeur de ses actes.
Porté disparu avec l'équipage de la Croix-du-sud,
dont il était le chef de bord. Accomplissait sa 24e traversée
de l'Atlantique sur la ligne postale qu'il avait été
le premier à tracer. Entre de plain-pied dans la légende
et s'inscrit parmi les héros les plus purs de l'aviation
française."
Après la mort de Mermoz, sa
veuve se remarie avec l'ingénieur et l'avionneur Couzinet,
ami de Mermoz, qui se suicidera le 16 décembre 1956 après
avoir tué son épouse.
Qui mieux que Saint-Exupéry pour évoquer
le souvenir de Mermoz :
Quelques camarades, dont Mermoz, fondèrent la ligne
française de Casablanca à Dakar à travers
le Sahara insoumis (Terre des Hommes, Les Camarades, p 186
- 189,Éd. La Pléiade).
"Les moteurs d'alors ne résistant guère,
une panne livra Mermoz aux Maures ; ils hésitèrent
à le massacrer, le gardèrent quinze jours prisonniers
puis le revendirent. Et Mermoz reprit ses courriers au-dessus
des mêmes territoires.
Lorsque s'ouvrit la ligne d'Amérique, Mermoz, toujours
à l'avant-garde, fut chargé d'étudier le
tronçon de Buenos-Aires à Santiago ; et, après
un pont sur le Sahara, il fut chargé de bâtir un
pont au-dessus des Andes. On lui confia un avion qui plafonnait
à cinq mille deux cents mètres. Les crêtes
de la Cordillère s'élèvent à sept
mille mètres. Et Mermoz décolla pour chercher des
trouées.
Après le sable, Mermoz affronta la montagne, ces pics
qui, dans le vent, lâchent leur écharpe de neige,
ce palissement des choses avant l'orage, ces remous si durs qui,
subis entre deux murailles de rocs obligent le pilote à
une sorte de lutte au couteau. Mermoz s'engagea dans ces combats
sans rien connaître de l'adversaire, sans savoir si l'on
sort en vie de telles étreintes. Mermoz " essayait
" pour les autres.
Enfin, un jour, à force " d'essayer ", il se
découvrit prisonnier des Andes.
Échoués à quatre mille mètres d'altitude,
son mécanicien et lui cherchèrent pendant deux
jours à s'évader. Ils étaient pris. Alors,
ils jouèrent leur dernière chance, lancèrent
l'avion vers le vide, rebondirent durement sur le sol inégal,
jusqu'au précipice, où ils coulèrent. L'avion
dans la chute, prit enfin assez de vitesse pour obéir
de nouveau aux commandes. Mermoz le redressa face à une
crête, toucha la crête, et, l'eau fusant de toutes
les tubulures crevées dans la nuit par le gel, déjà
en panne après sept minutes de vol, découvrit la
plaine chilienne, sous lui, comme une Terre promise.
Le lendemain, il recommençait.
Quand les Andes furent bien explorées, une fois la technique
des traversées bien au point, Mermoz confia ce tronçon
à son camarade Guillaumet et s'en fut explorer la nuit.
L'éclairage de nos escales n'était pas encore réalisé,
et sur les terrains d'arrivée, par nuit noire, on alignait
en face de Mermoz la maigre illumination de trois feux d'essence.
Il s'en tira et ouvrit la route.
Lorsque la nuit fut bien apprivoisée, Mermoz essaya l'océan.
Et le courrier, dès 1931, fut transporté pour la
1ère fois, en quatre jours, de Toulouse à Buenos-Aires.
Au retour, Mermoz subit une panne d'huile au centre de l'Atlantique
Sud et sur une mer démontée. Un navire le sauva,
lui, son courrier et son équipage.
Ainsi, Mermoz avait défriché les sables, la montagne,
la nuit et la mer. Et quand il était revenu, c'était
toujours pour repartir.
Enfin après douze années
de travail, comme il survolait une fois de plus l'Atlantique
Sud, il signala par un bref message qu'il coupait le moteur arrière
droit. Puis le silence se fit. Pour toujours."
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