Mars 1959 - Mission à bord d'un Lancaster Contribution au sauvetage du thonier "Le Pourquoi pas II" |
Robert Brand, navigateur à la 55S, raconte une mission à bord d'un des Lancaster " SAR " (Search and Rescue) :
" Dans la nuit du 27 au 28 mars 1959, alors que je suis navigateur d'alerte SAR, l'amirauté de Dakar fait appel au Lancaster d'Agadir pour rechercher un thonier (Le Pourquoi Pas II) dépêché au large de Dakar et dont on est sans nouvelles. Cette zone n'est pas dans notre secteur habituel, mais les Sunderland de la 27F ne sont plus opérationnels et les P5M-2 Marlin destinés à les remplacer sont en cours de convoyage de Norfolk vers Dakar, via le Brésil, avec les équipages qualifiés de la 27F.
À Agadir, notre équipage est complet, le décollage pour Dakar-Yoff doit s'effectuer de nuit sur le Lancaster "O" ; l'avion est déjà paré avec les pleins complets et les chaînes SAR en place dans l'immense soute.
Après 7 heures de vol, atterrissage à Yoff ; les mécaniciens complètent les pleins et effectuent un contrôle rapide de notre "O" puis briefing avec les autorités compétentes ; une dernière précision : un cargo de la Compagnie Delmas Vieljeux, le "La Palisse" en transit au large, vient de capter plusieurs messages de détresse du thonier, permettant de le localiser avec une relative précision dans le S-O du Cap Vert à environ 250 nautiques.
Décollage de Yoff et mise de cap sur le secteur estimé ; la météo est bonne ; en surface, une houle assez longue mais faible du S-O ne donnant pas trop d'écho de "retour de mer", nous effectuons plusieurs déroutements sur des échos de navires sans résultats.
Après une heure trente de vol, notre radariste détecte à l'aide du radar APS-15 un écho faible, dans le 230 à 40 nautiques, qui semble immobile ; légère altération de cap vers cet objectif qui se rapproche. L'observateur avant surveille aux jumelles pour identifier ce bateau qui ne provoque aucun sillage, c'est notre "Pourquoi Pas II" Descente et procédure classique pour le largage des chaines SAMAR dont les divers containers sont dotés de vivres, médicaments, etc. Les pilotes larguent l'ensemble à quelques mètres du bord ; les 8 hommes d'équipage sont sur le pont et mettent une plate à l'eau pour récupérer l'ensemble. Ensuite, contact avec un bâtiment de la Royale, "Le Tenace" pour lui préciser les coordonnées du thonier qu'il devra remorquer jusqu'à Dakar. Un dernier passage sur le "Pourquoi Pas II" et mise de cap sur Yoff où nous atterrissons de nuit après 6 heures de vol.
Nous n'avons pas eu le plaisir de rencontrer les équipages des 2 bateaux au moment où ils accostaient à 13 h 30, le 30 mars, car nous étions en vol entre Dakar et Agadir où nous atterrirons après 6 h 30 de vol. Le thonier avait été victime d'une rupture de vilebrequin. La une du quotidien "Paris Dakar" de mars 1959 relate le sauvetage du thonier et un mousse y déclare : "Avec un quart d'eau et une poignée de riz, nous avions tout juste de quoi ne pas mourir de faim".
NB : Chaine SAMAR : (chapelet de containers suspendu à un parachute et équipé d'un dinguy pneumatique qui se gonfle au contact de l'eau).
Source : René Bourneton, pilote